ARGUMENT ANALYTIQUE

L. Sergius Catilina, issu d'une famille patricienne, trouva dès sa jeunesse la carrière des magistratures naturellement ouverte devant lui. Il y entra comme préteur d'Afrique, et ne se signala dès son début que par des exactions et des violences. Aussi lorsque, de retour à Rome, il voulut se mettre sur les rangs pour le consulat, poursuivi par les Africains pour ses concussions, il fut forcé de renoncer à satisfaire son ambition par les voies légales. Une première conspiration contre les nouveaux consuls, deux fois avortée, nain deux fois impunie ; des accusations dont le laissa triompher tantôt la vénalité du juge, tantôt celle de l'accusateur, ne firent que l'encourager dans les préparatifs d'un plus vaste et plus effrayant complot. La corruption des moeurs publiques ne lui donna que trop de complices ; l'un d'eux livra bientôt à une femme tous les secrets de la conjuration, au moment même où le succès semblait certain. Celle-ci s'empressa d'en donner connaissance à Cicéron. Apres avoir fait au sénat un rapport détaillé sur les renseignements qui lui avaient été fournis, et demandé que la convocation des comices consulaires fût différée de quelques jours, Cicéron interpella le lendemain Catilina lui-même, et n'en reçut que l'audacieuse réponse qui donnait ouvertement un chef au parti du peuple contre celui du sénat. Alors fut rendu le décret par lequel, dans les circonstances périlleuses, les consuls étaient revêtus d'une autorité dictatoriale.

Lorsqu'arriva le jour des comices, Cicéron, instruit cette fois encore d'un nouveau complot contre sa vie, le déjoua par les précautions dont il s'entoura dans le champ de Mars. Catilina, ainsi réduit à l'impuissance, résolut de recourir à la guerre ouverte. Mallius, son complice, regagna l'Etrurie, où il prit les armes le 27 octobre 690. Le 28, un projet de massacre dans Rome échoua par la vigilance du consul. Le 1er novembre, une attaque contre Préneste ne réussit pas mieux. Enfin, dans la nuit du 6 au 7, Catilina réunit ses complices chez le sénateur P. Léca, l'un d'eux, et là furent résolus le meurtre de Cicéron, l'incendie de Rome, le soulèvement de l'Italie et le départ de Catilina pour le camp de Fésules. Au point du jour, les assassins se présentèrent chez Cicéron, dont la porte resta fermée. Aussitôt le consul convoqua le sénat dans le temple de Jupiter Stator. Catilina s'y rendit, soit pour rassurer ses complices, soit pour détourner les soupçons. Lorsqu'il entra, tous les sénateurs s'écartèrent à son approche et laissèrent vide la partie de l'enceinte où il alla se placer. C'est en ce moment que le consul, D'abandonnant à son indignation, lui adressa la harangue connue sous le nom de Première Catilinaire. Catilina répondit par quelques paroles, hypocrites et suppliantes d'abord, puis menaçantes à la fin, entra furieux dans sa maison et quitta Rome, la nuit même, pour aller rejoindre Mallius et son armée.



I. Tous les desseins de Catilina sont connus ; s'il vit encore, il ne le doit qu'à l'indulgence du consul.

II. Cicéron n'a pas fait usage des pouvoirs sans bornes dont il est armé depuis vingt jours, mais sa vigilance suit partout le coupable.

III. Le consul sait tout, a tout prévu, tout annoncé.

IV. Il rend compte de la réunion nocturne des conjurés chez le sénateur Léca, des discours qu'on y a tenus, des plans qu'on y a formés. Catilina ne le démentira point.

V. Que Catilina se retire avec ses complices, qu'il cesse de mettre plus longtemps la patrie en danger, qu'il se rende en exil.

VI. Quel charme peut le retenir dans une ville où tous les citoyens le craignent et le méprisent ?

VII. Le sénat lui a manifesté toute son horreur. La patrie elles même le conjure de s'éloigner.

VIII. Catilina a demandé une surveillance dont aucun citoyen honnête n'a voulu se charger ; il demande au sénat un arrêt que le silence même des sénateurs prononce assez clairement.

IX. Cicéron est prêt à braver tous les dangers pour le salut de la patrie. Poursuivi par la haine s'il exile Catilina, la gloire l'attend, au contraire, si Catilina va rejoindre son armée, comme il parait s'y disposer.

X. Qu'il aille donc où l'appelle sa perverse nature ; qu'il poursuive ces desseins auxquels l'ont préparé des travaux si vantés.

XI. Mais la patrie s'oppose à cette indulgence, et reproche au consul sa faiblesse ; la loi veut que Catilina périsse ; en ne l'exécutant pas, Cicéron encourt la haine de tous les bons citoyens.

XII. Il n'aurait pas hésité à frapper ; mais on refuse encore de croire à cet horrible complot, et la mort de Catilina ne débarrasserait Rome que du seul Catilina, tandis que son départ la délivrera de tous les conjurés.

XIII. Que tous les méchants aillent chercher en Etrurie la punition de leurs forfaits. Que Jupiter sauve Rome et frappe les sacrilèges.