[I. Contexte politique et moral de l'affaire Catilina]

Préambule Sommaire Chapitre 2

En abdiquant la dictature, Sylla laissait aux Romains une constitution qu'il crut suffisamment protégée par le souvenir des massacres qui l'avaient précédée. Il s'était efforcé de rendre à l'aristocratie l'ancienne influence qu'elle exerçait dans le gouvernement de la république, avant que les conquêtes ou les surpations des tribuns eussent donné aux assemblées du peuple le pouvoir réservé pendant longtemps aux seules réunions du sénat. Tout était à refaire, l'aristocratie elle-même aussi bien que les lois ; mais tout semblait possible à sa volonté de fer et à son impitoyable obstination.

Le sénat renouvelé par lui, avec une espèce d'impartialité, reçut le dépôt du pouvoir qu'il abandonnait. C'était au corps constitué et non à ses créatures qu'il le remettait, car il ne prit aucune mesure pour que l'administration des affaires tombât aux mains des hommes qui l'avaient le mieux servi (1). Sylla n'aimait et n'estimait personne ; il avait accompli une mission qu'il croyait tenir de la Providence, et peut-être encore, en renonçant avec franchise à sa puissance absolue, prétendait-il répudier toute responsabilité pour l'avenir. Semblable à ces divinités des fables antiques, il jetait sur la terre une semence qu'il laissait au destin le soin de faire fructifier (2).

Peu après sa mort, un ambitieux obscur tenta de rallumer le feu de la guerre civile ; mais on était las de révolutions. Ce fut en vain que M. Aemilius Lépidus voulut appeler aux armes les Italiotes sur lesquels la tyrannie du dictateur s'était appesantie le plus durement. Leurs braves étaient morts, leurs chefs étaient devenus Romains. Battu dans un combat tumultueux aux portes de Rome, Lépidus alla mourir ignoré en Sardaigne (3). Quelques-uns de ses soldats passant la mer grossirent l'armée de Sertorius (4), le dernier des lieutenants de Marius qui eût survécu aux victoires de Sylla. Sertorius combattait encore en Espagne pour une cause désespérée en Italie, ou plutôt, il avait adopté l'Espagne pour patrie, et ne songeait plus qu'à défendre son indépendance contre Rome. Il s'était fait barbare pour demeurer libre.

Le besoin de repos après tant de troubles, et cette espèce d'affaissement moral qui s'empare d'un peuple longtemps travaillé par de cruelles révolutions, servirent puissamment les successeurs de Sylla, et le gouvernement oligarchique se consolida, bien que dépourvu d'une force réelle. Tandis que les peuples respiraient, ne pensant qu'à réparer les maux de la guerre civile, le nouveau sénat administrait les affaires, et l'autorité semblait douce, exercée par des hommes en toge, succédant à des soldats sanguinaires. Bientôt le pouvoir se concentra entre les mains d'un petit nombre de sénateurs, façonnés par une longue expérience aux intrigues de la curie et du Forum. Tant de noms illustres, qui rappelaient aux Romains des victoires et des conquêtes prodigieuses, le souvenir de toutes les gloires de la république qui pendant plusieurs siècles s'étaient rattachées au sénat comme à un centre commun, en imposaient à la multitude et commandaient pour le corps politique le respect que chacun de ses membres était loin de mériter. Tel est le pouvoir des traditions, que ces hommes profondément corrompus, parvenus aux honneurs à force de bassesses, retrouvaient sur leurs chaires curules quelque chose de cette fermeté et de ce patriotisme qui avaient élevé si haut leurs ancêtres. Sans doute ce n'était plus cette assemblée de rois qui avait excité l'admiration de Cinéas (5), mais le plus vil des sénateurs pensait encore comme Fabricius lorsqu'il s'agissait de la suprématie de Rome. Aussi grand qu'autrefois devant l'étranger, le nouveau gouvernement révélait dans l'administration intérieure ses vices honteux, son égoïsme et son insatiable avarice.

Il prétendait accaparer pour lui seul les richesses du monde entier asservi à la république, et en retour, il offrait au peuple, c'est-à-dire aux oisifs de Rome et de l'Italie, la paix et la tranquillité. Mais cette paix devait-elle être de longue durée ? Sylla avait donné un exemple funeste, et tout ambitieux disposant d'une armée pouvait tenter de renverser un gouvernement de vieillards protégé seulement par l'insouciance et la lassitude des peuples. Les meneurs du sénat s'aperçurent bientôt que pour les défendre contre de pareilles entreprises il leur fallait l'appui d'un général, qui lui-même consentît à se laisser guider par leurs conseils.

Obligés à se mettre ainsi sous la protection d'un homme de guerre, ils résolurent de s'attacher le jeune Pompée, le plus célèbre et le plus humain des lieutenants du dictateur. La fortune toujours fidèle à ses drapeaux, la gloire de ses triomphes, la douceur et l'aimable facilité de son caractère, l'avaient rendu l'idole des légions et du peuple ; mais si l'on étudiait l'homme, sans se laisser éblouir par le prestige qui l'entourait, on ne trouvait sous cette grande renommée qu'un esprit médiocre, des vues étroites, une ambition qui prenait sans cesse l'apparence pour la réalité. Habile général dans une guerre régulière, il montra sa nullité lorsque, au lieu de faire manceuvrer des soldats, il s'agit de mettre en mouvement des nations. Magistrat intègre à une époque de corruption effrénée, loyal comme un soldat, juste lorsque son jugement n'était point faussé par des conseils perfides, Pompée avait mille belles qualités (6), mais un seul défaut les ternissait toutes, c'était un amour-propre excessif, aussi aveugle pour lui-même que dangereux pour la république, car il le livrait à la merci des intrigants qui savaient le flatter. Pourvu qu'on lui répétât incessamment qu'il était le premier citoyen de Rome, l'unique soutien de l'Etat, il laissait exercer le pouvoir aux orateurs qui l'entouraient de leurs hommages (7). Ce caractère le désignait naturellement pour devenir le champion du sénat, si je puis emprunter cette expression au moyeu âge. Il était fait pour gagner des batailles sous un gouvernement honnête, aussi fort qu'était le sénat deux siècles auparavant. Mais, élevé trop vite et trop haut, il se crut le génie de Sylla. On le nomma le protecteur de la république sans s'assurer d'abord de sa constance et de sa fermeté. Rien ne fut épprgné pour satisfaire son orgueil et son ambition. Tous les honneurs qu'il put souhaiter, on les lui accorda. Les pouvoirs les plus extraordinaires lui furent décernés (8), en un mot, on lui donna dans la république une autorité toute royale, dans la confiance qu'il n'en abuserait pas, car longtemps on crut que satisfait de l'éclat extérieur de la puissance, il en laisserait l'exercice à ceux (lui l'avaient porté à cette immense fortune.

Cependant le besoin de popularité qui l'agitait sans relâche, l'empêcha d'être un instrument toujours docile entre leurs mains, et sa faiblesse, trop bien connue de tous les partis, le jetait tour à tour dans les résolutions les plus contradictoires. C'est ainsi qu'après avoir écrasé, en Afrique et en Sicile, les derniers débris de la faction de Marius, déjà blasé sans doute sur les caresses et les flatteries de ce sénat qu'il venait d'affermir, il voulut mériter les louanges des vaincus, et porta sans s'en douter le coup le plus rude à la constitution de Sylla, en rendant aux tribuns du peuple une partie de leurs anciennes prérogatives (9).

Effrayés par ces velléités démocratiques qu'on ne pouvait ni prévoir, ni conjurer, les chefs du sénat, se sentant déjà d'ailleurs assez forts à Rome, voulurent soustraire Pompée à des influences rivales. Ils l'éloignèrent donc. La guerre des Pirates, l'expédition du Pont, furent des occasions naturelles de l'enlever aux intrigues de leurs adversaires, et Pompée accepta successivement, avec joie, des missions glorieuses qui occupaient sou activité, et satisfaisaient sa passion pour le commandement.

Toute vaine que fût en effet cette puissance de Pompée, elle ne laissait pas de blesser quelques ambitions, et parmi les sénateurs , il y en avait plus d'un qui ne se contentait pas d'une autorité réelle au prix d'une sujétion nominale. D'ailleurs, il était évident pour tous que le gouvernement institué par Sylla tendait à se perpétuer dans un petit nombre de familles, et nécessairement ces maisons privilégiées ne trouvaient jamais que leur part fût assez grande. Après tant d'années de révolutions successives, il n'y avait plus personne de conscience assez timorée pour hésiter à mettre en feu la république, plutôt que de se résigner à y jouer un rôle médiocre (10).

Crassus, lieutenant de Sylla comme Pompée, Crassus, qui avait délivré Rome des Samnites, qui avait exterminé les esclaves révoltés (11), s'indignait de se voir préférer ce jeune favori de la fortune, dont il affectait de mépriser les faciles triomphes (12). Lucullus rappelé à Rome après avoir vaincu Mithridate et Tigrane, pour que Pompée recueillit le fruit de ses victoires (13), beaucoup de préteurs, de généraux, de consulaires, dépouillés du commandement et réduits à servir sous les ordres de celui qu'on appelait Cnéius le Grand (14), rapportaient à Rome des sentiments d'envie et de haine contre l'idole du jour. Le mauvais succès de leurs intrigues pour la renverser les éloignèrent du parti oligarchique, dont la plupart étaient appelés par leur naissance et par leurs antécédents à être les soutiens.

Pendant que l'aristocratie, à peine échappée aux haches de Marius, se divisait, affaiblissant ainsi son autorité mal affermie encore, un parti redoutable se formait dans l'ombre, qui lui préparait les plus rudes assauts. Il se composait des débris de la faction de Cinna et de Marius, de tous les fils des proscrits exclus par le dictateur des charges publiques, enfin de tous les hommes ruinés par la dernière révolution, ou lésés par les violences qui avaient précédé l'établissement de la constitution cornélienne. A Rome, le peuple conservait un attachement à la mémoire de Marius ; les Italiotes lui devaient le nom de Romains dont ils étaient fiers aujourd'hui, et mainte ville appauvrie par les confiscations de Sylla n'avait d'espoir d'un meilleur avenir que dans le retour au pouvoir de la faction vaincue (15). Echappé par miracle aux proscriptions, un neveu de Marins, le jeune C. Julius César, avait relevé son drapeau de la poussière, et le jour qu'il osa porter au Forum l'image de son oncle (16), l'enthousiasme populaire révéla aux meneurs du sénat combien était grand le nombre de leurs ennemis. Il s'augmentait encore d'une foule d'hommes indifférents aux passions politiques, mais avides de nouveautés. Après le bouleversement de toutes les fortunes, suite inévitable des guerres civiles, Rome et l'Italie étaient remplies de familles déchues, réduites à la misère, qui auraient favorisé toute tentative de réaction, parce qu'une loi sur l'abolition des dettes était comme une conséquence forcée de toute révolution victorieuse.

Il y avait enfin une classe de mécontents plus turbulents et plus téméraires. Le dictateur avait payé avec de l'or les services de ses satellites, mais il ne leur avait laissé aucune influence politique. En peu de temps les biens des proscrits, partagés entre ses officiers et ses créatures, avaient été dissipés dans la débauche. Ces hommes s'étaient abandonnés aux profusions les plus extravagantes, comme s'ils eussent compté sur d'interminables proscriptions pour satisfaire leur cupidité. Les soldats colonisés par Sylla étaient tombés dans la misère dès qu'il ne leur avait plus été permis de piller et de rançonner leurs voisins. Travailler pour vivre, ils ne pouvaient s'y résoudre. Aussi prodigues qu'eux, leurs officiers, dépourvus d'instruction pour la plupart , paresseux et inhabiles aux affaires, poursuivis d'ailleurs par le souvenir de leurs rapines et de leurs cruautés, végétaient dans l'obscurité, car tout citoyen ayant un patrimoine les détestait, et mettait tout en oeuvre pour les exclure des charges publiques, principal moyen de fortune pour les Romains. Hommes de guerre, ils s'indignaient de se voir supplantés par des hommes de tribune, et ils appelaient de tous leurs voeux une catastrophe qui rendît de nouveau leurs épées nécessaires, et qui les dérobât aux lois trop impartiales établies par leur vieux capitaine.

Ainsi, lorsque Rome fut délivrée de son terrible dictateur, lorsque cette masse d'esclaves se vit inopinément émancipée par la mort de son maître, elle se divisa entre quatre factions principales, hostiles les unes aux autres, et toutes animées par des sentiments d'intérêt personnel, qui paraîtront vils, si on les compare aux passions soulevées jadis par la grande lutte entre les patriciens et les plébéiens.

Pour la clarté du récit j'essayerai de donner à ces différents partis des dénominations qui les caractérisent.

J'appellerai «faction oligarchique» le petit nombre de familles dont les chefs dirigeaient le sénat et gouvernaient de fait la république. Je nommerai «faction aristocratique» les sénateurs autrefois attachés à Sylla, mais jaloux de Pompée, et qui aspiraient à exercer le pouvoir usurpé par un petit nombre de leurs collègues. Crassus peut être considéré, non comme le chef, mais comme un des plus illustres représentants de cette minorité du sénat, qui comptait d'ailleurs presque autant d'ambitions différentes que de maisons considérables.

Sous la dénomination de «parti de Marius», je comprendrai tous les hommes qui naguère persécutés par le dictateur, se ralliaient sous la direction de C. César, presque également odieux aux deux partis précédents, car par une espèce d'instinct, ils devinaient dans le neveu de Marius le génie qui allait les écraser tous (17).

Je proposerai enfin de désigner sous le nom de «faction militaire» la foule des anciens officiers de Sylla restés en dehors des affaires, qui cherchaient dans le désordre une occasionde faire fortune. De toutes les factions hostiles au gouvernement, c'était alors la plus dangereuse, car elle se composait presque entièrement de gens sans principes, hardis, habitués à la violence, qui pouvaient se mettre pour un jour à la solde de quiconque leur eût offert l'appât du pillage. Outre les vétérans de Sylla, ils pouvaient, pour un coup de main, entraîner la populace, sur laquelle ils exerçaient une grande influence par leurs profusions et par leurs moeurs crapuleuses (18).

Parmi les plus audacieux de cette faction à laquelle se réunissait une portion considérable de la jeunesse patricienne, se distinguait L. Sergius Catilina (19), homme d'une naissance illustre, qui pendant la guerre civile s'était signalé dans l'armée de Sylla autant par sa cruauté que par sa brillante valeur. On racontait de lui des traits de férocité qu'on a peine à croire. Après avoir assassiné son frère, il avait, dit-on, obtenu qu'il fût inscrit, tout mort qu'il était, sur la liste des proscrits, et avait reçu du dictateur le prix d'un meurtre qui n'avait pas une cause politique (20). Rome entière l'avait vu, les mains ruisselantes de sang, porter au bout d'une pique la tête de Marius Gratidianus, vieillard vénérable qu'il avait lui-même décapité après lui avoir fait subir d'horribles tortures (21). On ajoutait que Aurelia Orestilla, dame romaine célèbre par sa beauté et sa dépravation, ayant fait quelque difficulté pour l'épouser à cause d'un fils déjà grand qu'il avait d'un premier lit, ce fils disparut soudainement aussitôt que Catilina connut la seule objection qu'on opposait à ses poursuites (22). Tels étaient les crimes dont on le chargeait presque publiquement, et cependant Catilina était entré dans la carrière des honneurs, et plusieurs fois avait obtenu les suffrages dans les comices. Il avait même exercé la préture, et par conséquent pouvait prétendre au consulat. Il n'était pas dépourvu d'éloquence, et ses ennemis mêmes ne lui ont pas refusé de la capacité pour les affaires, surtout un rare talent de séduction (23). Malgré les atrocités qui avaient souillé sa jeunesse, il était lié avec la plupart des hommes d'Etat, et plusieurs personnages considérés l'avaient ouvertement soutenu dans ses candidatures. Mais c'était sur la jeunesse patricienne qu'il possédait surtout un ascendant extraordinaire. On vantait sa force, sa vigueur, son adresse à tous les exercices du corps, son tempérament de fer, qui bravait impunément les excès de la débauche et les plus rudes fatigues de la guerre. Il était en quelque sorte le modèle que se proposaient les jeunes gens qui aspiraient à mériter les louanges de leurs égaux. De tout temps l'adresse aux exercices gymnastiques a passé pour un des plus rares mérites aux yeux de la jeunesse, et l'on conçoit que chez un peuple belliqueux les qualités d'un bon soldat devaient être particulièrement en honneur. Toutefois, les exercices favoris à cette époque avaient quelque chose d'abrutissant, car ils rapprochaient ceux qui désiraient s'y distinguer de l'espèce d'hommes la plus méprisée, des gladiateurs. Pour s'instruire dans les règles bizarres d'une escrime inutile à la guerre, la plupart des jeunes patriciens se faisaient gloire de leurs relations familières avec des esclaves couverts de crimes. Aujourd'hui ils s'enivraient dans les tavernes avec ces misérables, le lendemain ils applaudissaient au coup adroit qui les étendait sur l'arène (24).

Catilina prétendait à une gloire plus haute que celle qui s'acquérait dans les écoles de gladiateurs, et la soif de l'or n'était même pas le seul mobile de son ambition. Il y avait en lui quelque chose d'un Marius ; ou, peut-être, faut-il croire avec Salluste, que tourmenté par le souvenir de ses crimes jusqu'au milieu des débauches où il se plongeait, il ait cherché dans le tumulte d'une révolution des émotions assez puissantes pour faire diversion à ses remords (25). A voir la pâleur de son visage livide, ses yeux injectés et toujours menaçants, sa démarche brusque et incertaine, on devinait assez qu'il fuyait le repos avec une espèce d'horreur ; mais ni les veilles, ni les exercices les plus rudes, ne pouvaient mater ce corps en proie à une agitation frénétique (26).

Depuis longtemps, au reste, il s'était plongé dans cette vie de plaisirs brutaux, peut-être par un calcul bizarre d'ambition. Il s'étudiait à exercer une véritable domination sur la jeunesse. Par le libertinage il l'initiait au crime. Fidèle à ses camarades d'orgie, il ne les abandonnait jamais dans les dangers ; souvent il les y entraînait sans motif, ou plutôt, par une prévoyance détestable, afin de les aguerrir, et d'obtenir sur eux un empire absolu, en les tirant d'affaire par son audace et sa fertilité d'expédients (27). C'était à Catilina qu'il fallait s'adresser pour choisir un cheval, acheter de belles armes, ordonner des jeux ou appareiller des gladiateurs. Puis il était toujours prêt à servir ses amis dans leurs querelles particulières, dans leurs amours, dans leurs embarras d'argent. Nul mieux que lui ne savait tromper la sévérité d'un père, éluder la surveillance d'un magistrat, vaincre l'avarice ou déjouer les poursuites d'un usurier. Fournir de faux témoins, se parjurer lui-même, au besoin préparer des poisons ou procurer des meurtriers à gages, c'étaient à ses yeux des services d'amis qu'il ne refusait jamais. Et ces sortes de services, souvent réclamés dans l'épouvantable corruption de cette époque, entouraient Catilina d'une foule de clients d'autant plus dévoués qu'il tenait en quelque sorte leur vie entre ses mains.

On se tromperait grandement à se représenter les jeunes patriciens au septième siècle de la république, avec les vices presgue aimables, apanage ordinaire de la jeunesse, surtout dans notre pays. Les vices des Romains étaient ceux d'un peuple féroce et tout puissant ; chez cette nation tout était excessif. Longtemps un patriotisme exalté, un orgueil immense lui tinrent lieu de vertus. Tant que Rome fut une petite ville, ses moeurs rudes et grossières eurent une austérité imposante, parce que déjà ambitieuse, elle voulait exciter l'admiration là où elle ne pouvait encore montrer sa puissance. Mais, lorsqu'elle fut devenue le centre d'un vaste empire, lorsqu'elle régna en dominatrice du monde, alors débarrassée de toute contrainte, elle jeta son masque d'emprunt, comme une armée victorieuse après un long siége oublie son ancienne discipline pour courir au pillage.

L'honneur, c'est-à-dire le désir de mériter l'estime, ou la crainte d'encourir le mépris, est la base sur laquelle reposent nos sociétés modernes. On comprend qu'un tel sentiment n'existe avec toute sa force que dans des groupes ou des centres assez peu nombreux pour que tous les individus qui les composent aient entre eux un commerce continuel ; voilà pourquoi dans nos grandes villes les associations du monde, qui n'ont d'autre but apparent que des plaisirs frivoles, exercent cependant une si grande influence sur les moeurs. En effet, la vie de chaque individu est surveillée sans cesse dans ces relations de tous les jours. Elles ont leurs lois impérieuses aussi, qui prononcent une peine terrible, l'infamie, contre mainte action que les lois ordinaires ne peuvent atteindre. Réunis en coteries, les hommes sont plus justes et plus honnêtes qu'ils ne seraient confondus dans la foule, car chacun d'eux est jaloux de l'opinion de son compagnon qui l'observe ; juge sévère lui-même, il sait ce qu'il doit attendre de ses pareils. S'il n'en résulte au fond qu'une contrainte, bien différente de la vertu, du moins le vice est réduit à se cacher, et ne peut faire de prosélytes. C'est en formant des groupes semblables, en établissant entre eux le lien de l'habitude et de l'amour-propre, que la discipline fait des soldats braves et soumis d'une multitude timide et désordonnée.

L'honneur dans le sens étroit, et pourtant encore assez vague, qu'aujourd'hui l'on donne à ce mot, est trop souvent confondu avec le courage par une opinion qui remonte peut-être à des temps de barbarie. Mais le préjugé, suite de cette confusion, s'est en quelque sorte épuré en se transmettant d'âge en âge, et ses abus ne doivent pas faire oublier les avantages que toute la société en retire, la protection qu'il accorde au faible contre le puissant, surtout l'égalité qu'il établit entre les hommes. D'ailleurs, la présence des femmes dans nos réunions, le respect dont elles sont entourées, l'influence de leurs jugements sur les réputations, ôtent au courage brutal une supériorité qui revient à la politesse et à l'intelligence.

C'est par ces lois qui régissent la vie privée, que nos moeurs modernes l'emportent si incontestablement, je pense, sur les moeurs antiques.

Les Romains ignoraient ces relations du monde, où les hommes et les femmes se rencontrent pour se connaître et se juger, où loin des affaires et des préoccupations d'intérêt, tous les rangs se mêlent et se confondent sur un pied d'égalité. Dans la ville, chaque citoyen vivait renfermé au milieu de sa famille ; femme, enfants, esclaves, par le même mot il désignait tous les êtres auxquels il commandait eu maître absolu. S'il quittait sa maison, c'était pour aller sur la place publique, où, au milieu de la foule, il demeurait encore isolé. Il existait sans doute à Rome des associations plus ou moins nombreuses, mais en y entrant chaque homme abjurait ses opinions personnelles pour adopter un esprit de corps ; l'individu disparaissant en quelque sorte, perdait la responsabilité de ses actions, et les consciences les plus timides se taisaient lorsqu'il s'agissait de l'intérêt de l'association. D'abord les citoyens furent divisés en castes ; la distinction des castes abolie, ils se partagèrent en factions ; mais toujours le Romain ne vit dans un compatriote qu'un complice ou qu'un ennemi. Avec l'un il pouvait tout oser ; devant l'autre, il devait tout feindre et tout dissimuler. Dans les castes, d'ailleurs, aussi bien que dans les factions, il n'exista pas plus d'égalité sociale que d'indépendance individuelle. Patronage ou clientèle, on ne connaissait point d'autres rapports entre les hommes.

Sur les moeurs l'opinion n'avait presque aucun pouvoir, car personne ne rencontrait un juge impartial, et la calomnie était si fréquente, son impunité si bien établie, que les accusations les plus graves n'excitaient ni l'indignation ni la honte. La vertu ne pouvant être à l'abri du soupçon, le vice, qui n'était pas plus exposé, défiait le reproche.

Elevés par des esclaves intéressés à les corrompre, les hommes, blasés presque au sortir de l'enfance par l'abus des plaisirs grossiers, se mariaient de très bonne heure dans des vues d'intérêt, aussi incapables encore de diriger leurs femmes que de les protéger. Celles-ci n'étaient point associées à leurs occupations, connaissaient à peine leurs affaires, moins étroitement liées que leurs esclaves aux intérêts de leurs maris. Elles n'assistaient presque jamais à leurs réunions de plaisir, qui se changaient souvent en orgies. Comment, d'ailleurs, les Romains auraient-ils trouvé près de leurs femmes ces relations intimes, cet échange de sentiments et de pensées, cette confiance que donne une estime mutuelle? Systématiquement privée d'instruction, la femme romaine se vantait de son ignorance comme d'une vertu. Si l'on ne trouvait plus au septième siècle de la république de ces matrones sabines (28) qui passaient leur vie renfermées dans leur appartement, occupées à filer de la laine (29) au milieu de leurs esclaves, exercer son esprit, cultiver les arts, passait encore presque pour un crime (30). C'eût été se ravaler au niveau de ces courtisanes étrangères à qui l'on ne donnait une éducation brillante que pour vendre plus chèrement leurs faveurs. Traitées en esclaves par leurs maris, faut-il s'étonner que les femmes romaines eussent tous les vices de la servitude ? Doit-on taxer de mensonge les poètes qui imputent des goûts ignobles (31) et des débauches honteuses aux femmes des meilleures maisons ? Rien ne peint mieux le mépris dont tout leur sexe était frappé en Italie, que l'indifférence des hommes pour leur conduite. Il n'y avait pas même un mot dans la langue latine pour exprimer la jalousie ! Les lois qui rendaient le divorce si facile pour les hommes, montrent combien le mariage était peu de chose dans les idées antiques, de même que l'usage si répandu de l'adoption prouve combien faibles étaient pour les Romains les liens de la nature (32).

L'opinion des Romains sur l'infériorité et la dégradation des femmes, avec les débauches hideuses qui en sont la suite, paraît avoir été empruntée par eux aux Grecs, dont l'influence leur fit tant de bien et tant de mal. Mais chez les Grecs, on retrouve encore au milieu de leurs monstrueuses aberrations quelque exaltation féconde en nobles sentiments et en actions généreuses. Parmi les Romains rien de semblable. Ce qu'ils appelaient amour n'était qu'une satisfaction brutale des sens, et l'infamie semblait avoir un charme de plus pour ces hommes qui ne trouvaient le plaisir que dans d'ignobles extravagances. Nul sentiment élevé, nul de ces préjugés modernes, résultat des habitudes chevaleresques, n'adoucissait la grossièreté de leurs moeurs ou les couvrait d'un vernis décevant. Assassiner un rival, égorger un parent pour en hériter, empoisonner un mari pour posséder sa femme, étaient alors des actions trop communes pour étonner personne, et dont on se vantait même au milieu d'une orgie.

Chez un peuple où les liens de la famille et de la société s'étaient tellement affaiblis, ceux de la religion n'avaient pas plus de force pour le maintien des moeurs. Un siècle à peine s'était, écoulé depuis que Polybe exaltait la foi roulaine aux dépens de celle de ses compatriotes (33). Il disait alors que la parole d'un Romain était sacrée, mais déjà, peu d'années après lui, on avait appris à ne plus craindre les dieux vengeurs du parjure. Il s'en fallait cependant que le peuple fût sans croyances. Sa religion était un mélange de traditions Italiotes et de légendes poétiques empruntées aux Grecs, mais les unes et les autres avaient été modifiées par la prévoyance d'un gouvernement qui, pour me servir de l'expression de Montesquieu, sut toujours «asservir les dieux à la politique». Presque aucun précepte de morale n'était joint à la religion, au contraire, elle pouvait conduire à bien des crimes, par cette tendance ou plutôt cette loi naturelle qui porte les hommes à se faire un culte en incitant les actions que les légendes prêtent à leurs divinités (34). Dans les croyances antiques, l'idée de bonté, et même de justice, n'était pas associée à l'idée de Dieu, aussi toutes les pratiques n'étaient en quelque sorte que des préservatifs coutre le caprice ou le mauvais vouloir du ciel. Le peuple superstitieux à l'excès (35) observait fidèlement les rites bizarres qu'il avait reçus de ses ancêtres, ou que lui commandait le sénat, autorité toujours respectée sur les matières religieuses. Pour la plupart des Romains le culte des divinités nationales se confondait avec l'amour du pays, parce que dans leurs idées, leur Jupiter très bon, très grand et les autres dieux du Capitole, avaient pour Rome une partialité aussi absolue que le patriotisme des citoyens était exclusif. Ils croyaient conquérir et s'approprier les divinités étrangères, comme autrefois ils avaient augmenté leur nation en y incorporant les peuples vaincus. On sait qu'avant de donner un assaut ils avaient soin d'adjurer solennellement les dieux topiques de la ville assiégée, de quitter leur ancienne demeure, leur promettant, s'ils consentaient à être transfuges, à venir habiter Rome, des jeux, des fêtes, des temples plus magnifiques qu'ils n'en avaient jamais eu (36). Cette séduction des dieux que le pontife exerçait au nom de tout le peuple, les particuliers croyaient y parvenir par des voeux et par des sacrifices. Chaque Romain avait sa divinité protectrice à laquelle il rendait un culte domestique, et pourvu qu'il ne manquât point à l'honorer par les hommages spéciaux que prescrivaient ses traditions de famille, il se regardait comme à l'abri du courroux céleste. Impitoyables pour toute omission aux rites sacrés, les divinités païennes pardonnaient facilement les crimes contre les mortels. Elles avaient exterminé tous les Potitius pour s'en être remis à leurs esclaves du soin d'un sacrifice (37), mais elles avaient adopté dans leur olympe Romulus meurtrier de son frère.

Telles étaient sur la religion les idées du vulgaire, et si l'on peut s'exprimer ainsi, les croyances officielles.

Parmi les hommes appelés par leur fortune et leur naissance à remplir les charges les plus éminentes, et, comme tels, qui avaient reçu une éducation grecque, le plus grand nombre appartenait, de nom du moins, à la secte d'Epicure, dont ils transformaient les dogmes en préceptes d'égoïsme grossier. D'autres, et surtout ceux qui prétendaient à se distinguer en imitant l'austérité des moeurs antiques, affichaient le rigorisme des stoïciens qui servait de manteau à leur hypocrisie. Quelques-uns niaient ouvertement le pouvoir temporel de la Providence, et à l'époque où commence mon récit, il y a lieu de croire que c'était en réalité l'opinion dominante dans le sénat et parmi toutes les familles illustres. Tous cependant, et même les esprits les plus élevés partageaient sur quelques points les superstitions de la multitude. Tel se riait de la religion de ses ancêtres, qui donnait toute sa confiance aux jongleries d'un magicien étranger (38). Crédules ou sceptiques, tous étaient publiquement rigoureux observateurs des rites sacrés, dont les hauts fonctionnaires politiques étaient, comme on sait, les seuls ministres. Un athée reconnu briguait une charge de pontife et l'obtenait sans scandaliser personne. Indifférents sur leurs croyances, les Romains ne s'attachaient qu'à la forme consacrée, aux pratiques traditionnelles. Elles étaient à leurs yeux des recettes merveilleuses, une espèce de sorcellerie sainte, dont il importait peu de rechercher la cause. Ils portaient en tout d'ailleurs ce scrupuleux attachement à la forme, et c'est peut-être le trait le plus frappant de leur caractère national. Dans leurs lois comme dans leurs transactions politiques, l'esprit le cédait toujours à la lettre. Leur procédure consistait dans une série de formules orales, accompagnées d'une pantomime bizarre, et l'omission d'un mot, d'un geste entraînait la nullité d'une action. Non seulement certains jours appelés Néfastes, certaines heures, suspendaient toutes les affaires publiques ou privées, mais les assemblées même du peuple étaient soumises à des rites étranges où la moindre erreur avait les plus graves conséquences. Des accidents naturels et impossibles à prévoir, un éclair dans le ciel, un coup de tonnerre, un homme attaqué subitement d'épilepsie, c'en était assez pour arrêter la délibération la plus importante (39). Les élections mêmes étaient cassées lorsqu'on y surprenait un vice, c'est-à-dire l'oubli d'une cérémonie préparatoire, par exemple, lorsque le magistrat chargé de prendre les auspices avait négligé de regarder le ciel en entrant ou bien en sortant de son observatoire (40). De là, un perpétuel mensonge, une comédie jouée sérieusement au milieu des affaires les plus graves, toujours grotesque, souvent odieuse. Mais aussi, de cet attachement à la forme résultait, pour les institutions elles-mêmes, une force et une permanence dont l'histoire d'aucun attire peuple ne pourrait fournir l'exemple.

Ce respect superstitieux pour des institutions que les plus hardis voulaient fausser, mais n'osaient détruire, conservait la société romaine au milieu de sa profonde corruption. Elle avait encore pour se défendre contre l'étranger, l'habitude de la guerre et une discipline admirable, enfin ces traditions de courage et de mépris de la mort que des races héroïques avaient transmises pour unique vertu à leurs indignes descendants.


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(1)  Plut., Sull., 31.

(2)  Hes., Theogon., 180-195. - Paus., 7, 17, 15.

(3)  Liv., Epit., XC. - Sall., Frag., I, 1. - Asc., in Scaur.

(4)  Jul. Exsup., 660. Sylburg.

(5)  Plut., Pyr., 19.

(6)  Plut. Pomp., 1.

(7)  Periculum... Cn. Pompeii divino consilio depulsum est (Cic., Pro leg. Man., 4).

(8)  Notamment par la loi Gabinia, rendue en 687 sur la proposition du tribun du peuple A. Gabinius. «A. Gabinius tribunus legem tulit ut, cum belli more, non latrociriorum, orbem classibus jam, non furtitis expeditionibus, piratae terrerent, quasdamque Italiae orbes diripuissent, Cn. Pompeius ad eos opprimendos mitteretur, essetque ei imperium aequum in omnibus provinciis cum proconsulibus, usque ad quinquagesimum milliarium a mari, quo senatusconsulto pene totius terrarium orbes imperium uni viro deferebatur». (Vell., II, 31. - Cfr. Dio Cass., XXXVI, 6, 7, 20. - Plut., Pomp., 2

(9)  Loi Pompeia, A, de R. 681. - Sur ce point, Sylla avait dépassé le but. Il avait fait aux tribuns une position si médiocre et si pénible, que le temps était venu, ou de supprimer entièrement l'institution, ou de lui rendre une partie de son importance. - Malgré la loi Pompeia, le tribunat demeura fort affaibli, d'abord parce que le prestige de son inviolabilité et de sa toute-puissance avait été détruit par le dictateur, puis par le maintien d'une disposition importante dictée par Sylla, à savoir, que les tribuns ne pourraient être choisis que dans l'ordre du sénat (Cfr. Ernesti ad Suet., Aug., 40. - Caes.,Civ., 1, 7. - Cic., de Leg., III, 9).

(10)  Quicumque aliarum ac senatus partium erant, conturbari rempublicam quam minus valere ipsi, malebant (Sall., Cat., 37).

(11)  A. de R. 683.

(12)  ... Pompeii felicitatem, cui praecipua militiae laus de tam imbelli genere hostium contigisset (Suet., C. Jul.).

(13)  Lois Gabinia et Manilia. - Plut., Luc., 35. - Vell., II, 31, 2. - Dio Cass., XXXVI, 6. - Plut., Pomp., 25.

(14)  Cneius Magnus. Pompée ne prit ce surnom dans les actes officiels et dans sa correspondance que vers l'époque de ses campagnes contre Sertorius, c'est-à-dire plusieurs années après qu'il lui eut été décerné. (Plut., Pomp., 13).

(15)  Quorum victoria Sullae parentes proscripti, bona erepta, jus libertatis imminutum, haud sane alio animo belli eventum spectabant (Sall., Cat., 37).

(16)  Aux obsèques de sa tante Julia, femme de Marius, vers l'an de Rome 684 (Plut., Caes., 5).

(17)  César, pris par des pirates, s'écriait : «Quelle joie pour Crassus !» (Plut., Cras., 7.)

(18)  Cuncta plebs incepta Catilinae probabat (Sal., Cat., 47).

(19)  Le nom patricien de Sergius se lit dans les Fastes dès l'an 304 de Rome. Catilina paraît être un sobriquet grossier, indiquant des habitudes de pillage. On le traduirait littéralement par le terme militaire de fricoteur (catillo, catilla, gulosa qui per alienas aedes cursitat liguriendi causa). Ce surnom fut-il donné à L. Sergius dans les guerres civiles ? Il est permis d'en douter, car Cicéron n'eût pas manqué sans doute de le rappeler. Il me paraît plus probable qu'un des ancêtres de Lucius l'aurait reçu, et qu'il se serait conservé dans la famille Sergia, avec cette insouciance dont les généalogies romaines offrent tant d'exemples.

(20)  Plut., Sull., 32.

(21)  Q. Cic., De pet. cons., 3.

(22)  Sall., Cat., 15. - Val. Max., IX, 1, 9.

(23)  Habuit Catilina permulta maximarum non expressa signa sed adumbrata virtutum... Neque ego unquam fuisse tale monstrum in terris puto, tam ex contrariis diversisque inter se pugnantibus nature studiis cupiditatibusque conflatum (Cic., Pro Cael., 5). Me ipsum inquam quondam pene ille decepit (Ibid., 6).

(24)  Nemo est in ludo gladiatorio paullo ad facinus audacior qui se non intimum Catilinm fateatur (Cic, Cat., II, 5).

(25)  Quae quidem res mihi imprimis videur caussa fuisse facinoris maturandi (Sall., Cat., 15).

(26)  Sall., Cat., 15.

(27)  Si caussa peccandi in praesens minus suppetebat, nihilominus insontes, sicuti sontes, circumvenire, jugulare ; scilicet, ne per otium torperent manus aut animus, gratuito potius, malus arque crudelis erat (Sall., Cat., 16). 21.

(28)  ... Veteres imitata Sabinas. (Juv., X, 299.)

(29)  Vellere tusco / Vexatae duraeque manus. (Juv., VI, 289.)

(30)  Litteris graecis et latinis docta, psallere et saltare elegantius quam necesse est probae, multa alia quae instrumenta luxuriae sunt, sed ei cariora semper omnia quam decus atque pudicitia fuit... Verum ingenium ejus haud absurdum posse versus facere, jocum movere, sermone uti vel modesto, vel molli vel procaci (Sal., Cat., 25).

(31)  ... Ferrum est quod amant. (Juv., VI, 111.)

(32)  Voir de quelle manière Cicéron annonce à Atticus la mort de son père : Pater nobis decessit a. d. VIII kat. dec. - Tu velim si qua ornamenta gumnasiwdh, reperire poteris, etc. (Cic., ad Att., 1, 5).

(33)  Pol., VI, 56.

(34)  Le culte dans toutes les religions antiques était une imitation du dieu, c'est-à-dire qu'on répétait les actions attribuées à ce dieu, quelque absurdes ou même cruelles qu'elles pussent ètre, sans s'embarrasser du sens mystérieux caché sous le mythe qui racontait ces actions. Ainsi les Galles imitaient Atys en se faisant eunuques. Les Orgiastes imitaient la fureur consacrée de Bacchus. Voilà deux imitations qui pouvaient mener fort loin.

(35)  Pol., VI, 56.

(36)  Te simul, Juno regina, quae nunc Veios colis, precor, ut nos victores in nostram, manoque mox futuram, urbem sequare ; ubi te dignum amplitudine tua templum accipiat (Liv., V, 21).

(37)  Liv., IX, 20.

(38)  On dit que C. J. César, après avoir fait dans un voyage une chute de voiture, ne montait jarnais dans un char sans avoir récité auparavant deux vers grecs comme préservatif contre un semblable accident.

(39)  Jove tonante fulgurante, comitia populi habere nefas (Cic., Div., II, 18).-Quid gravius quam rem susceptam dirimi, si unus augur I dixerit (de Leg., II, 12). - Servi, ancillae, si quis eorum sub centone crepuit, quod ego non sensi, nullum mihi vitium facit ; si cui ibidem servo aut ancillae dormienti evenit, quod comitia prohibere solet, ne is quidem mihi vitium facit (Fest., verbo Prohibere).

(40)  Literas misit (Tib. Gracchus Cos.) se recordatum esse vitio sibi tabernaculum captura fuisse, hortos Scipionis ; quod quum pomerium postea intrasset habendi senatus causa, in redeundo quum idem Pomoerium transiret, auspicari esset oblitus : itaque vitio creatos consules esse (Cic., de Nat. deor., II, 4).