Jean, Hyacinthe, Eudal de Gazanyola (1766-1854)

Il naquit le 16 mars 1766, de François-Xavier de Gazanyola, et d'Eulalie Bou de Villenouvette ; il fit ses études au collège des Oratoriens, à Pézenas, la philosophie et une année de droit à l'Université de Perpignan. Elève, en 1785, à l'école royale d'artillerie de Metz, il s'y trouvait officier de cette arme en 1791, lors de l'arrestation de Louis XV1 à Varennes. Les événements qui suivirent et le serment qu'on exigea de l'armée et qu'il refusa de prêter, le décidèrent à émigrer. Reçu dans le corps de la noblesse française, qu'organisa le prince de Condé, il fit neuf campagnes avec les armées autrichiennes et russes, pendant les guerres de la Révolution.

En 1801, Jean de Gazanyola quitta le service, et se retira en Espagne près des frontières de la France, sa patrie, vers laquelle il n'avait cessé de tourner les yeux. En s'éloignant du prince de Condé, il reçut un témoignage flatteur de son estime, l'attestation que, dans toutes les affaires, il s'était comporté avec honneur, zèle et courage. Arrivé en Catalogne, au mois de juillet 1801, il vécut honorablement, tirant parti de ses connaissances en mathématiques.

Il revit la France en 1803, où sa famille l'accueillit avec une tendre cordialité. Jean de Gazanyola fut nommé, dès le mois de septembre 1814, au Conseil général des Pyrénées-Orientales. Créé chevalier de Saint-Louis le 22 novembre 1815, le roi le désigna, en 1816, pour inspecter les gardes nationales du département. Il fut, successivement, membre du conseil municipal de Perpignan, en 1821, et conseiller de préfecture, en 1822, position qu'il conserva jusqu'aux événements de juillet 1830. Ses principes, son attachement inviolable à la monarchie légitime ne lui permirent point de continuer à exercer des fonctions publiques sous un autre gouvernement. Quoique son dévo&ucircment à la cause de la branche aisée des Bourbons fut sans bornes, on le vit porter une bienveillante modération, une intelligence supérieure, dans les nombreuses et importantes opérations dont la direction lui fut confiée. Ainsi, chargé, en 1814, de la visite des prisons, pour constater la situation politique de chacun des prévenus et signaler ceux qui avaient droit à la clémence du roi ; commissaire délégué, en 1815, auprès du corps espagnol qui avait envahi le territoire, et dont on devait suspecter les intentions, il sut, dans ces missions délicates, allier la prudence à la fermeté. La formation du Musée de la ville de Perpignan, la réunion des documents pour dresser la statistique départementale, la surveillance de la bibliothèque furent aussi mises sous sa direction, et, partout, il apporta, avec un zèle inébranlable, le tribut de ses vastes connaissances.

Rentré en 1830 dans la vie privée, il se livra exclusivement à l'étude. L'histoire, l'astronomie, les mathématiques, l'économie politique, toutes les branches de la science lui étaient familières, et occupaient noblement ses loisirs. Il ne pouvait mieux les employer qu'en réunissant des matériaux pour l'histoire de son pays : il y travailla avec ardeur, et poursuivit cette oeuvre avec une persévérante activité pendant plus de vingt ans ; mais, à peine l'avait-il terminée, que la mort vint le surprendre, au moment où il se proposait de la livrer à la publicité. Jean de Gazanyola mourut le 24 mai 1854. L'histoire de Roussillon vit le jour trois ans après la mort de son auteur, en 1857. L'éditeur fut le baron Guiraud de Saint-Marsal, neveu de Jean de Gazanyola. En composant cet ouvrage, Jean de Gazanyola n'eut qu'une ambition : résumer les travaux d'une époque, élever un édifice avec les matériaux réunis par Puiggari et les frères Saint-Malo. Son oeuvre compléta celle d'Henri. Jean de Gazanyola en a défini lui-même la portée et la lacune de ses efforts, lorsqu'il écrivit : «Henry eut principalement en vue la liaison de l'histoire de France à celle d'Aragon : mon but est moins élevé... Je me borne à établir, d'abord, clairement, la série des princes qui ont gouverné le Roussillon ; à narrer exactement ou à rectifier les faits qui ont illustré leur règne ; à exposer les progrès de la civilisation, des sciences et des arts dans cette contrée qui changea si souvent de maître et d'intérêts ; à faire bien connaître enfin une province dont le sol, la culture, les ressources et les produits sont loin d'être appréciés comme ils devraient l'être.»

Notice biographique parue en tête de l'Histoire de Roussillon, par J. de Gazanyola.