HASTA (ἔγχος)

  1. Lance, employée comme une pique pour percer, et comme un trait pour être jetée avec la main. Elle se composait de trois parties distinctes : la tête (cuspis, αἰχμή et ἐπιδορατίς) en bronze ou en fer ; le bois (hastile, δόρυ) en frêne ou autre bois ; et une pointe de métal au bout (spiculum, σαυρωτήρ ou στύραξ), qui servait pour la fixer verticalement dans le sol, ou qui devenait une arme offensive quand la tête était brisée (Polyb. VI, 25). La figure du haut dans la gravure ci-jointe représente une tête de lance romaine tirée d'une fouille faite dans le Lincolnshire ; celle du centre, une pointe pour le bout, d'après un vase d'argile ; et celle du bas, la lance entière, avec les trois parties assemblées.

    La manière de la lancer se voit dans la gravure ci-après, prise du Virgile du Vatican, qui a pour objet de représenter l'attaque et la défense d'une place fortifiée : la même gravure explique aussi les termes plus spéciaux adoptés pour décrire cette action. On observera que la figure qui est au pied des murailles a l'intérieur de la main tourné en dehors, et dans une telle position elle devait jeter son arme en la brandissant avec un mouvement qui lui donnait de la force et qui est exprimé par les mots rotare (Stat. Theb. IX, 102) ou torquere (Virg. Aen. X, 585 ; XII, 530) ; ceux d'au-dessus ont le dos de la main tourné en dehors et le petit doigt au lieu du pouce dans la direction de la tête de la lance : ce qui représente la manière ordinaire de jeter le trait exprimée par les mots jacere, jactare, mittere, etc., quand on le tenait et qu'on le balançait à son centre de gravité, avec le dos de la main tourné en bas, pour viser son but avant de lancer ; dans ce cas, la tête et la pointe du bout se levant et s'abaissant alternativement, comme le fléau d'une balance (libra), l'action était désignée par le mot librare (Virg. Aen. IX, 417 ; X, 480); ce dernier passage établit une distinction marquée entre jacere et librare.
  1. Hasta amentata (Cic. de Orat. I , 57). Lance munie d'une courroie pour aider à la lancer (voy. amentum et la gravure).
  1. Hasta ansata (Ennius ap. Non., p. 550). Lance avec une poignée fixée sur le bois pour aider à porter des coups et à la jeter (voy. ansatus, 2, et la gravure).
  1. Hasta velitaris (γρόσφος). La lance ou le dard employé par les troupes romaines armées à la légère, dont le bois était long d'environ trois pieds et épais d'un doigt, pendant que la tête n'avait pas plus d'un empan de longueur, mais était si mince et terminée par une pointe si délicate, qu'elle se courbait immédiatement dès qu'elle rencontrait quelque chose qui offrait trop de résistance ; par conséquent, si le soldat manquait son but, elle était inutile à l'ennemi et ne pouvait être renvoyée (Liv. XXXVIII, 20 ; Plin. H.N. XXVIII, 6 ; Polyb. VI, 22). On voit la tête d'une de ces armes dans la gravure, d'après un original trouvé dans un retranchement romain, Meon-Hill, dans le Gloucestershire.
  1. Hasta pura. Lance sans tête (cuspis), comme le vieux sceptre grec (σκῆπτρον) , que le général romain donnait à titre de récompense honorable au soldat qui s'était distingué dans la bataille (Tac. Ann. III, 21 ; Virg. Aen. VI, 760 ; Serv. ad 1. ; Suet. Claud. 28). La gravure est copiée d'une peinture qui décore le tombeau de la famille des Nasons, près de Rome.
  1. Hasta praepilata, avec l'antépénultième brève. Lance dont la pointe est mouchetée ou couverte d'un bouton ou d'une halle (pila) au bout, comme nos fleurets (Plin. H.N. VIII, 6) : les soldats s'en servaient dans leurs exercices (Hirt. B. Afr. 72) et dans les revues ou aux combats simulés (Liv. XXVI, 51).
  1. Hasta pampinea. Le thyrse de Bacchus, appelé ainsi parce que c'était dans l'origine une lance avec la tête cachée dans des feuilles de vigne (Virg. Aen. VII, 396 ; Calpurn. Ecl. X, 65), comme le spécimen ci-joint, pris d'une peinture de Pompéi.
  1. Hasta graminea (κάμαξ). Lance faite d'une espèce de roseau élancé des Indes, qu'on avait l'habitude de placer entre les mains des statues colossales de Minerve, en raison de sa longueur et de ses dimensions imposantes (Cic. Verr. II, 4, 56).
  1. Hasta caelibaris. Lance avec la pointe de laquelle le fiancé romain séparait la chevelure de la fiancée le jour du mariage (Festus, s.v. ; Ov. Fast. II, 560, hasta recurva). L'épithète qu'Ovide donne à cet instrument fait entendre que ce n'était pas d'une lance ordinaire qu'on se servait à cet effet, mais de la lance rustique ou sparum. Voy. ce mot.
  1. Hasta publica. Lance dressée comme le signe d'une enchère publique quand les biens étaient publiquement livrés au plus offrant (Corn. Nep. Att. 6 ; Cic. Off. II, 8) ; coutume née des habitudes de pillage des anciens Romains qui, lorsqu'ils disposaient du butin pris à la guerre, plantaient à côté une lance pour indiquer d'où venait le droit de propriété.
  1. Hasta centumviralis. Lance qu'on avait coutume de dresser comme emblème d'autorité dans les tribunaux des centumviri ; de là, l'expression centumviralem hastam erigere signifie convoquer les centumvirs et les appeler à leurs sièges, ou, en d'autres termes, ouvrir leur tribunal (Suet. Aug. 36 ; Mart. VII, 63).

Illustration complémentaire

Ensemble de lances et bouclier
Rheinisches Landesmuseum, Trier (Allemagne), 2001

© Agnès Vinas