1. Ses origines
  2. Son installation en Grèce
  3. L'extension de ses assimilations
  4. Mythologie - Son enfance
  5. Mythologie - Les orgies
  6. Mythologie - Ses ennemis
  7. Mythologie - Ariane
  8. Mythologie - L'Asie mineure et l'Inde
 
  1. Le dieu du vin
  2. Ses attributs moraux
  3. Ses symboles naturels
  4. Ses symboles fabriqués
  5. Représentations anthropomorphiques
  6. Dionysos, Héra et Athéna
  7. Un dieu de mystères
  8. Dionysos/Bacchus en Italie

Celle des fables relatives aux ennemis que rencontre et combat Dionysos, qui apparaît la première, est celle de sa lutte avec Lycurgue. La plus antique version de ce récit se trouve dans l'Iliade ; elle place l'histoire pendant l'enfance du dieu. Lycurgue, fils de Dryas, poursuit avec sa hache à deux tranchants les nourrices de Dionysos sur le mont Nysion et les fait fuir dispersées ; le jeune dieu se précipite dans la mer, où Thétis le recueille et le sauve. Zeus frappe de cécité le roi thrace, et les dieux le font bientôt périr. C'est cette version qu'a suivie l'auteur d'une pierre gravée qui représente Dionysos enfant, tenant le thyrse, porté sur les flots par un hippocampe. La fable se développe ensuite considérablement, et ces nouvelles variantes placent toutes l'histoire à une époque postérieure à l'enfance du dieu. Chez Hygin, Lycurgue se déclara l'ennemi de Dionysos et dans son ivresse veut souiller la couche de sa propre mère et arracher la vigne dans son pays. Dionysos le frappe d'une folie furieuse dans laquelle le roi tue sa femme et son fils et se coupe à lui-même un pied avec sa hache, le prenant pour un cep de vigne. Le dieu le précipite ensuite des sommets du Rhodope et le fait déchirer par ses panthères, ou bien Lycurgue se tue lui-même. Suivant Apollodore, c'est au retour de l'Inde que Dionysos vient en Thrace avec son cortège et est attaqué par Lycurgue. Le dieu se jette à la mer et trouve un refuge près de Thétis ; ses Satyres et ses Ménades sont réduits à l'état de captifs. Pour châtier Lycurgue, Dionysos lui envoie la fureur pendant laquelle il tue d'un coup de hache son fils Dryas, croyant couper une vigne. Le roi thrace revient ensuite à la raison ; mais son pays est frappé d'une incurable stérilité. L'oracle consulté répond que la terre ne donnera de nouveau ses fruits que lorsque Lycurgue aura été mis à mort. Alors les Edoniens le saisissent et l'abandonnent, chargé de liens, dans le Pangée, où Dionysos le fait mettre en pièces par des chevaux. Enfin, dans le récit de Diodore, le dieu du vin, revenant en Europe après des expéditions victorieuses en Asie, fait une alliance avec Lycurgue, roi de Thrace, et, laissant son armée de l'autre côté de l'Hellespont, vient chez lui, entouré des seules Ménades. Lycurgue complote de l'égorger dans la nuit, mais ses embûches sont révélées par Tharops à Dionysos. Celui-ci, en s'échappant seul, gagne son armée, tandis que les Ménades se cachent dans le mont Nysion. Revenant ensuite avec toutes ses troupes, Dionysus défait les Thraces, prend Lycurgue vivant et le fait torturer, aveugler, enfin mettre en croix.

La fureur de Lycurgue, telle qu'on la racontait avant ce dernier travestissement evhémériste, a été chantée par Sophocle ; Eschyle en avait fait le sujet d'une de ses trilogies. Les artistes l'ont souvent retracée. On la voyait dans les peintures d'un des temples situés à Athènes dans le téménos de Dionysos Eleuthereus. Une pierre gravée représente le roi thrace arrachant la vigne dans sa fureur ; un vase peint le montre tuant avec la bipenne son fils Dryas. Des compositions plus étendues, où Lycurgue tue sa femme et son fils et où Bacchus, entouré de personnages de son thiase, assiste aux effets de la folie dont il a frappé son ennemi, nous sont offertes par des bas-reliefs et surtout par des vases peints.

Sur un sarcophage de la villa Albani, ce n'est pas sa femme que tue Lycurgue. L'artiste a suivi les données particulières de la forme du récit adoptée aussi par Nonnus et le roi thrace frappe la nymphe Ambrosia, qui se change en vigne ; deux Erinnyes, placées de chaque côté du groupe, excitent sa fureur, et l'une d'elles est accompagnée de la panthère qui déchirera Lycurgue ; Bacchus leur commande, soutenu par Silène et escorté d'un Satyre, d'un Pan et d'Opora ou Pomona. La fable de Lycurgue est encore le sujet d'une mosaïque de Naples.

Toute cette légende est une personnification des phénomènes de l'hiver, qui porte pour un temps dans la nature le ravage et la désolation. L'hiver, avec ses tempêtes, est figuré d'une manière saisissante par le sauvage roi de Thrace, apparenté à Borée, fils ou père de Dryas, c'est-à-dire sortant des grandes forêts des montagnes où habitent les loups (Lukourgos). Dans l'Iliade, il attaque les nourrices de Dionysos enfant, car c'est précisément en hiver que l'on fêtait la naissance éternellement renouvelée de ce dieu, d'abord caché dans l'antre de Nysa, qui apparaîtra dans toute sa gloire au printemps. De là l'époque où on célébrait les Trieterica de la Béotie et de la Phocide, les Dionysies des champs et les Lénées en Attique, c'est-à-dire ses plus anciennes fêtes [Dionysia]. Plutarque parle des gelées qui venaient souvent troubler les orgies du Parnasse. C'est ainsi que dans les versions postérieures Lycurgue s'attaque au dieu au milieu de sa fête et sévit contre ses Ménades. Mais Lycurgue, comme l'hiver qu'il personnifie, meurt bientôt sous le poids de ses propres fureurs, et c'est seulement après sa mort que la terre redevient fertile.

Naxos avait son récit spécial pour l'expression de la même donnée. Butès, fils de Borée, frère et successeur de Lycurgue, y était représenté comme arrivant dans l'île avec une colonie de Thraces. Manquant de femmes, il allait avec ses compagnons en enlever sur la côte de Thessalie, tombait au milieu de la fête de Bacchus et sans respect pour la sainteté s'emparait des Ménades qui la célébraient ; celle qu'il enlevait pour lui-même était appelée Coronis. Alors le dieu le frappait de fureur et finissait par le changer en fontaine.

A mesure que le siège de la fable de Lycurgue était reporté vers le Nord, une autre légende, qui exprimait le même symbolisme en le mêlant au souvenir des immolations humaines des Agrionia primitives, se développait comme la légende spécialement béotienne. Penthée, Pentheus, l'homme du deuil, fils d'Echion, l'un des Spartes nés des dents du serpent de Thèbes, et d'Agavé, fille de Cadmus, homme sauvage, féroce et à la taille gigantesque, y est l'antagoniste du dieu. Roi de Thèbes, Penthée veut s'opposer à la fondation des fêtes orgiastiques auxquelles Dionysos, à son retour d'Asie, convoque les femmes sur les montagnes. Résolu à disperser la troupe des Ménades, il se rend sur le Cithéron, et là se cache dans un buisson pour épier les rites dont la contemplation est interdite aux hommes. Il y est aperçu par sa propre mère, qui dans l'ivresse du vin et de la bacchanale le prend pour un animal sauvage, un sanglier, un lion, ou un chevreau. Les Ménades lui donnent alors la chasse, le saisissent et le mettent en pièces ; les plus acharnées sont sa mère Agavé et ses tantes, Ino et Autonoé. Les gens de Corinthe ajoutaient que la Pythie avait ordonné aux femmes béotiennes de rechercher le buisson sous lequel s'était caché Penthée et de lui rendre des honneurs divins, et ils montraient dans un temple de leur ville deux xoana faits avec son bois. Eschyle le premier mit à la scène cette fable de Penthée et Euripide en a fait le sujet de sa tragédie des Bacchantes. Elle était retracée dans les peintures d'un des sanctuaires du dieu à Athènes et dans un des tableaux que décrit Philostrate. C'est aussi cette fable que nous retrouvons sur un certain nombre de monuments de l'art parvenus jusqu'à nous, et dont le plus célèbre est un bas-relief existant à Rome dans le palais Giustiniani. Sur quelques pierres gravées on voit Agavé en Ménade, tenant la tête de Penthée.

C'est toujours par la folie furieuse que Bacchus punit les contempteurs de son culte ; nous en avons un autre exemple dans l'histoire des filles de Minyas, Alcithoé, Leucippé et Arsippé, avec laquelle on mettait en rapport l'institution des Agrionia d'Orchomène. Refusant de se joindre aux autres femmes qui vont célébrer la fête du dieu, elles restent à leurs travaux ; Dionysos lui-même prend la figure d'une jeune fille pour les dissuader de cette impiété. Elles ne l'écoutent pas ; alors il les épouvante par ses miracles, se changeant successivement en taureau, en lion et en panthère ; enfin il les frappe de fureur. Leucippé déchire dans cet accès son propre fils Hippasos. Hermès enfin les transforme en chauve-souris, en chouette et en chat-huant.

Les filles de Proetus dédaignent aussi le culte de Dionysos et refusent de s'y associer, c'est du moins une des causes que l'on attribue à leur fureur [Proetides]. Saisies de folie, elles se croient devenues des vaches et se mettent à errer dans la campagne en mugissant ; bientôt la même fureur gagne toutes les femmes de Tirynthe. Proetus est obligé d'accepter les dures conditions que lui impose Mélampus, le prophète de Dionysos, pour se charger de leur guérison. Mélampus les suit alors avec des chants et des danses mystiques jusqu'à Sicyone, et dans cette sorte de chasse Iphinoé, l'une des Proetides, meurt de lassitude. Mélampus atteint enfin les deux autres, et les guérit par des rites purificatoires. Cette expiation des filles de Proetus, dont la scène est placée à Sicyone ou près de Sicyone à Clitor, à Lusi d'Arcadie, ou à la source Anygros en Triphylie, est représentée sur un vase peint et sur un camée.

Dans la fable de Lycurgue nous avons vu l'ennemi de Dionysos triompher un moment du dieu, pour succomber à son tour sous le châtiment. Certains autres récits, d'un caractère toujours mystérieux, placaient à l'hiver une mort passagère de Bacchus, suivie de sa résurrection. La notion d'un dieu qui meurt et ressuscite est essentielle dans le personnage du Soma vêdique [voy. sect. I]: en Grèce elle a pris un autre sens dans les légendes du Dionysos thébain et dans celle du Zagreus crétois. A Delphes, dans le temple même on montrait le tombeau de Dionysos, sous l'omphalos ou près du trépied mantique. Plutarque nous apprend que chaque année, au moment des jours les plus courts, on offrait à cette tombe divine un sacrifice secret, qui coïncidait précisément avec l'instant où les Thyades, sur le Parnasse, réveillaient Dionysos Licnitès, c'est-à-dire le dieu nouveau-né porté dans le van. La coïncidence voulue des deux cérémonies de mort et de renaissance, en rend la signification parfaitement claire. On indique aussi un autre tombeau de Dionysos à Thèbes même. Parmi les auteurs qui parlent de sa sépulture à Delphes, les uns disent qu'il avait été tué par Lycurgue, les autres par Persée. C'était en effet une tradition très répandue que celle d'une lutte entre Dionysos et Persée, dans laquelle le fils de Sémélé avait été vaincu et avait trouvé la mort. A Lerne, cette légende était combinée avec la donnée mystique qui identifiait Dionysos à Hadès et en faisait le roi des enfers, aussi tenait elle une place importante dans les mystères locaux [voy. sect. XV, et Eleusinia]. Les traditions argiennes racontaient que Bacchus, venu des îles avec une armée de femmes, avait été vaincu par Persée, puis les représentaient réconciliés et recevant en même temps les adorations. Dans celles de Lerne même, Dionysos, tué par Persée, avait été jeté dans le lac Alcyonien, où, lors de la célébration des mystères, on l'évoquait du fond des régions infernales.

Mais cette cérémonie d'évocation nocturne au lac Alcyonien qui constituait proprement le rite des Nyctelia, était rapportée dans les mystères de Lerne à une autre fable, celle de la descente de Dionysos aux enfers pour y chercher sa mère Sémélé, que la tradition mystique de l'Argolide liait à l'histoire immonde de Prosymnus.

Cette descente aux enfers n'est, du reste, qu'une forme adoucie et euphémique de la mort. La tradition en existait aussi à Delphes, où les Thyades la commémoraient tous les neuf ans dans la fête appelée Herois. Elle avait une célébrité universelle, et l'un des grands titres de gloire de Bacchus était d'être ressorti vainqueur des régions infernales, ramenant sa mère Sémélé qu'il en avait arrachée, et l'introduisait ensuite au milieu des dieux dans l'Olympe, en lui donnant désormais le nom de Thyoné.

Un beau miroir étrusque, dont nous reproduisons le dessin, représente la réunion de Sémélé et de son fils divin ; Apollon assiste à leurs transports. Un vase peint de style ancien montre Dionysos et Sémélé qui remontent ensemble à la lumière. Divers monuments associent Sémélé divinisée à son fils. Ces légendes montrent comment le Bacchus Thébain se présentait déjà sous l'aspect d'un dieu guerrier, vainqueur de ses ennemis et même de la mort. C'est ainsi que sur l'ancien cycle de ses fables put se greffer facilement la donnée lydienne des conquêtes de Bassareus [sect. VIII]. Même avant l'introduction de ces données étrangères, Dionysos, envisagé comme héros, était le précurseur et le pendant d'Hercule [sect. XIV]. Aussi l'appelait-on Enyalios, Polemokelados, qui se plaît au bruit de la guerre. Une pierre gravée le montre en héros vainqueur, tenant le thyrse et la foudre, couronné par Athéné. Une représentation analogue s'observe sur un denier romain de la famille Cornelia. A Sparte une statue figurait le dieu tenant la lance au lieu de thyrse, de là son surnom de Doratophoros. Sur les monnaies de Maronée, Dionysos porte une grappe de raisin et deux javelots. Son thyrse même est une arme avec laquelle il combat, et on y voit une lance déguisée [sect. XII]. Dans une procession des dieux il figure avec ce thyrse et une cuirasse de peau de panthère. Un beau vase peint le représente s'armant au milieu des Ménades, qui lui apportent son casque et son bouclier, dont l'épisème est un Satyre.

Aussi prend-il part avec les autres dieux à la Gigantomachie, où il tue d'un coup de son thyrse Eurytus ou Rhoetus ; il y vient accompagné de ses Silènes et de ses Satyres. Sur un vase peint, on les voit accourir à son secours dans le combat ; un autre, au revers de la lutte du dieu contre Eurytus, nous montre un Satyre s'armant pour le combat. Dans d'autres récits il s'y change en lion pour déchirer les Géants, ou bien il est monté sur un âne dont le braiment épouvante les ennemis des dieux. L'oracle promettant la victoire aux Olympiens s'ils étaient assistés d'un héros est quelquefois appliqué à Dionysos, au lieu de l'être, comme d'ordinaire, à Hercule [Hercules]. L'intervention de ce dieu dans la guerre contre les Géants est plusieurs fois représentée sur les vases peints.

La peinture que nous reproduisons le montre combattant Eurytus, à côté d'Athéné qui terrasse Encélade ; Dionysos a pour auxiliaires dans cette lutte les animaux qui sont ses symboles, la panthère, le lion et le serpent.

Dans d'autres récits, c'est le même dieu qui tue Campé, le monstre à cinquante têtes qui gardait dans le Tartare les Cyclopes et les Hécatonchires, et que plus ordinairement on fait périr sous les coups de Zeus.

Dans les îles de la mer Egée, Dionysos avait surtout pour adversaires les représentants des puissances volcaniques et marines. A Naxos, Bacchus disputait la possession de l'île à Héphaestos et sortait vainqueur de cette querelle. Par contre, Stésichore racontait l'alliance amicale que ces dieux avaient faite et dont le gage avait été une coupe d'or donnée par Héphaestos à Dionysos, laquelle avait passé ensuite à Thétis et d'elle à Achille. A Lemnos aussi les traditions locales parlaient de l'amitié et de l'union de Dionysos avec Héphaestos et les Cabires [Cabiri]. Le sujet d'un vase peint paraît emprunté à ces fables lemniennes et représente Hermès amenant à Dionysos les deux Cabires Alcon et Eurymedon, fils d'Héphaestos. Plus célèbre et plus généralement répandue était la légende qui représentait Dionysos comme parvenant à ramener dans l'Olympe, après l'avoir enivré, Héphaestos, lorsque celui-ci, irrité contre sa mère Héra, ne voulait plus reparaître au milieu des dieux [Vulcanus]. Cette scène était retracée sur le trône de l'Apollon Amycléen et dans les peintures d'un des sanctuaires de Dionysos à Athènes ; Epicharme en avait fait le sujet de sa fameuse comédie intitulée Héphaestos ou les buveurs, et il semble que ce fut la pièce du porte dorien qui mit ce récit mythique particulièrement à la mode chez les céramistes. Un miroir étrusque représente Héphaestos et Dionysos s'embrassant.

Les légendes béotiennes racontaient que Bacchus avait vaincu Triton, qui enlevait les troupeaux sur les côtes. A Naxos il triomphait du dieu marin Glaucus, qui lui disputait l'amour d'Ariadne. Dans cette même île son culte avait été précédé par celui de Poseidon, qu'il avait supplanté. Aussi disait-on qu'il avait fait sentir sa puissance belliqueuse sur mer aussi bien que sur terre.

Le plus éclatant de ceux de ses triomphes qui avaient la mer pour théâtre était celui qu'il remportait sur les pirates tyrrhéniens. C'est déjà le thème du septième hymne de la collection homérique. Le dieu, prêt à quitter l'île d'Icaria pour se rendre à Naxos, se montre sur la côte sous les traits d'un beau jeune homme. Les Tyrrhéniens l'emmènent captif sur leur vaisseau. Mais ses liens se détachent d'eux-mêmes, toutes les parties du navire sont subitement enveloppées de pampres et de lierre ; enfin Dionysos prend la forme d'un lion et les pirates épouvantés se précipitent dans la mer, où ils sont changés en dauphins. Dans les versions postérieures, le récit va toujours en se surchageant de nouveaux prodiges.

C'est le sujet de la belle frise du monument choragique de Lysicrate à Athènes ; le dieu est assis au centre de la composition, ayant un lion près de lui et entouré de Satyres ; d'autres chargent des chaînes les pirates et les torturent avec des torches ; quelques-uns de ces pirates se jettent dans la mer et opèrent leur transformation. Sur un autre monument, le dieu, qui va combattre les Tyrrhéniens, est représenté presque enfant, tenant lui-même les torches et s'avancant sur les flots de la mer. Un vase peint à figures noires est plus conforme aux données de l'hymne homérique ; Dionysos y est resté seul dans le vaisseau, dont le mât est enveloppé d'une vigne ; autour nagent les Tyrrhéniens changés en dauphins.

La même fable était le sujet d'un des tableaux décrits par Philostrate. Sur certaines pierres gravées, on voit un dauphin avec un thyrse. Les pontes qualifient quelquefois le dauphin de tyrrhenus piscus.

C'est encore une allusion à cette victoire sur les Tyrrhéniens qu'il faut reconnaître dans le vase d'ancien style, où l'on voit Dionysos accompagné de deux Satyres jouant de la double flûte, dans un char en forme d'une galère portée sur des roues. Tout à fait analogue devait être la trirème que l'on promenait à Smyrne dans la fête de Bacchus, comme commémoration d'une victoire navale sur les gens de Chios, gagnée avec son secours. Dans cette cérémonie encore, il avait essentiellement le caractère d'un dieu vainqueur sur mer et qui y fait vaincre.


Article de F. Lenormant