12. Il se conduisit avec le peuple comme s'il eût vécu dans un Etat libre. Plein de bonté pour les hommes, il avait l'art de les détourner du mal et de les porter au bien, donnant des récompenses aux uns, adoucissant les peines des autres. Il rendit bons les méchants et excellents les bons. Il supporta aussi avec modération les railleries de quelques personnes : un certain Vétérasitrus, qui avait la plus détestable réputation, lui demanda un jour une dignité ; l'empereur l'exhorta à détruire l'opinion qu'on avait de lui ; et celui-ci ayant répondu que l'on voyait au rang des préteurs plusieurs de ceux qui avaient combattu avec lui dans l'arène, il souffrit patiemment cette réponse. Craignant surtout de punir trop facilement, il avait l'habitude, quand un magistrat, fût-ce un préteur, s'était mal conduit, non de le contraindre à résigner ses fonctions, mais de les donner à un de ses collègues. Jamais il ne jugea en faveur du fisc, dans les causes qui pouvaient l'enrichir. Il savait être ferme et bon tout ensemble.

Lorsque son frère revint victorieux de la Syrie, on donna aux deux empereurs le titre de Pères de la patrie, parce qu'Antonin s'était conduit, pendant l'absence de Vérus, avec beaucoup de modération envers les sénateurs et tous les citoyens. On leur offrit même à tous deux la couronne civique, et Lucius demanda qu'Antonin partageât avec lui les honneurs du triomphe ; il demanda aussi que les fils de ce prince fussent appelés Césars. Antonin poussa si loin la modestie, que, malgré son triomphe avec son frère, il lui laissa, après sa mort, le nom de Parthique, et il prit celui de Germanique, que ses propres exploits lui avaient mérité. Les enfants d'Antonin, de l'un et de l'autre sexe, eurent part au triomphe des deux princes ; en sorte que l'on vit alors des jeunes filles sur le char triomphal. Marc-Aurèle et Verus assistèrent en costume de triomphateurs aux jeux donnés pour cette cérémonie.

Entre autres preuves de l'humanité de Marc-Aurèle, on doit louer l'attention qu'il eut de faire mettre des matelas sous les danseurs de corde, après la chute de l'un d'eux ; et de là vient l'usage d'étendre aujourd'hui sous la corde un filet.

 

© Agnès Vinas

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Les Empereurs et Césars du IIe siècle dans l'Histoire Auguste

Hadrien (117-138), biographie d'Aelius Spartianus

Aelius Verus (adopté par Hadrien en 136, mort en 138), biographie d'Aelius Spartianus

Antonin le Pieux (138-161), biographie de Julius Capitolinus

Marc-Aurèle (161-180), biographie de Julius Capitolinus

Lucius Verus (161-169), biographie de Julius Capitolinus

Avidius Cassius (empereur autoproclamé en 175), biographie de Vulcatius Gallicanus

Commode (180-192), biographie d'Aelius Lampridius