7. Zénophante et Callidémide

Zénophante
Et toi, comment es-tu mort, Callidémide ? Moi, qui étais parasite de Dinias, j'ai été étouffé pour avoir trop mangé ; tu te le rappelles, tu étais présent à ma mort.

Callidémide
Oui, Zénophante ; mais ce qui m'est arrivé est incroyable. Tu connais, je crois, le vieux Ptéodore.

Zénophante
Ce vieillard sans enfants, riche, et avec qui je te voyais souvent ?

Callidémide
Lui-même ! Je lui faisais une cour assidue, et il me promettait que je ne perdrais rien à sa mort. Mais comme la chose traînait en longueur, et que le bonhomme vivait plus que Tithon, j'imaginai un chemin plus court pour arriver à l'héritage. J'achète du poison, j'engage l'échanson de Ptéodore à le mêler dans sa coupe, et, quand le vieillard, qui boit volontiers, demanderait à boire, à la tenir prête et à la lui présenter : je lui jure que, s'il le fait ainsi, je lui donnerai sa liberté.

Zénophante
Eh bien ! qu'est-il arrivé ? Il me semble qu'il va se passer quelque chose d'extraordinaire.

Callidémide
Quand nous fûmes revenus du bain, le jeune homme, qui déjà tenait les deux coupes toutes prêtes, l'une où était le poison pour Ptéodore, l'autre pour moi, me présenta, je ne sais par quelle erreur, la coupe empoisonnée, et à Ptéodore celle qui ne l'était pas. Il boit, et moi je tombe aussitôt à la renverse et j'expire à la plaee du vieillard. Eh quoi ! tu ris, Zénophante ? Tu ne devrais pas te moquer d'un ami !

Zénophante
C'est que l'aventure est plaisante, cher Callidémide ! Et le vieillard ?

Callidémide
D'abord cette mort soudaine le troubla ; mais comprenant, je crois, ce qu'il en était, il se mit à rire du tour que m'avait joué l'échanson.

Zénophante
Tu as eu tort de prendre le chemin le plus court ; la grande route était plus sûre, quoique un peu plus longue.

Traduction d'Eugène Talbot (1857)