PILA (avec la première syllabe longue, ἴγδη)


  1. C'est probablement un mortier profond (alta. Ov. Ibis, 573), où l'on broyait et mêlait différentes substances en une poudre impalpable (Plin. H.N. XVIII, 29, 2), en les écrasant avec un pilon très volumineux et très lourd (voyez Pilum, 1) ; d'où, par suite, les mots grecs ἴγδις et ἴγδισμα désignent aussi une danse, où l'on frappait souvent et très fortement la terre du pied. Le spécimen que nous donnons est la copie d'un original découvert à Pompéi. On y voit que la pila différait du mortarium, mortier de plus petite dimension, qui servait plutôt à pétrir, à faire une pâte ; mais la distinction n'est pas toujours observée.
  1. (πεσσός). Pilier ou pile de forme conique ; on en employait sous l'eau pour supporter le tablier d'un pont (Liv. XI., 51 ; Suet. Claud. 20 ; Senec. Q.N. 30) ; comme monument pour recevoir une inscription (Nep. Alc. 4) ; en avant d'une boutique de libraire, pour exposer aux regards les catalogues (Hor. Sat. 1, 4, 71) ; et à d'autres usages analogues.

  2. (ἐνδόμησις). Brise-lame, jetée ; toujours arrondie à son extrémité, elle présente, en ce point, de la base à son sommet, une figure à peu près analogue à celle des objets que l'on désigne proprement sous ce nom (Virg. Aen. IX, 711).


PILA (avec la première syllabe brève, σφαῖρα)


  1. Balle à jouer ; on comprenait sous ce nom générique les quatre sortes de balles dont se servaient les anciens, c'est-à-dire follis, harpastum, paganica et trigon ; chacune a son article.
  1. Pila picta (0v. Met. X, 262). Balle à jouer, dont l'enveloppe extérieure était peinte de différentes couleurs, et ornée d'emblèmes et de figures variées ; elle entre souvent sur les vases peints, comme accessoire dans des scènes de la vie du gymnase ou de jeux de femmes. C'est sur l'un d'eux qu'est pris le spécimen que nous en donnons ; il s'y rencontre parmi d'autres colilifichets, instruments de travail féminin et jouets, suspendus à la tombe d'une jeune fille grecque. Il semblerait que le vert ait été, pour ces balles, une couleur qu'on choisissait de préférence (prasina pila, Petr. Sat. 27) ; par suite, une de ces mêmes balles, dans une inscription (ap. Grut., tom. I, p. 2, 1537), est désignée par l'épithète vitrea, c'est-à-dire de couleur vitreuse et verdâtre, comme celle de l'eau ; de même vitrea unda (Virg. Aen. VII, 759), vitrea sedilia (Id. Georg. 350).
  1. Pila vitrea (Senec. Q.N. I, 6). Globe de verre rempli d'eau pour être placé entre une personne et l'objet qu'elle contemple afin de le grossir et de le faire voir plus nettement ; habitude que l'on a conservée dans la gravure sur bois et tous les autres travaux qui veulent une lumière brillante et claire, laquelle, en même temps, ne fatigue pas la vue. Il paraîtrait aussi, d'après le passage de Sénèque cité plus haut, que les anciens employaient quelquefois cet instrument pour aider une mauvaise vue, comme nous faisons de nos lunettes ; car les lunettes, dont le secours nous est si utile, ne furent inventées qu'au commencement du quatorzième siècle, par un Florentin nommé Salvino degli Amati, qui mourut en 1317, comme l'atteste l'épitaphe inscrite sur sa tombe (Manni, Dissert. degli Occhiali, p. 65). Il faut d'ailleurs se souvenir que les anciens, qui employaient comme lecteurs et secrétaires beaucoup d'esclaves instruits, n'avaient pas un aussi pressant besoin que nous de secours artificiels pour la vue. Un autre sens de pila vitrea est expliqué au paragraphe précédent.

  2. Pila mattiaca (Mart. XIV, 27). C'était une boule de pommade allemande que les dames de Rome et les jeunes gens à la mode employaient pour donner à leurs cheveux une teinte blonde et claire. Elle était faite de graisse de chèvre et de cendre de hêtre, le tout pétri ensemble et roulé en boule, et l'épithète qui la caractérisait lui venait de la ville de Mattium (Marpurg ou Marbourg), d'où on l'apportait à Rome.

  3. Boule servant de bulletin de suffrage, afin de choisir les juges qui seraient chargés de juger une cause, et d'empêcher par là qu'il n'y eût dans le tribunal faveur ou hostilité pour ou contre une des deux parties. A cette fin, ou mettait dans une boîte, inscrits chacun sur une boule, les noms des juges ; puis on les tirait au sort, comme nous faisons pour un jury, chaque partie ayant d'ailleurs le droit de signaler et de récuser tout juge qui serait son ennemi et dont elle craindrait la partialité (Prop. IV, 11, 20, et Ascon. Argument. Milon.).

  4. Mannequin, fait grossièrement de vieilles étoffes que l'on bourre de foin ; il servait à éprouver, quand on les avait domptés, le caractère de certains animaux, des buffles par exemple ; ou à les exciter quand ils paraissaient mornes et impassibles. Cette habitude se conserve encore à Mola, dans la baie de Gaète, à une certaine fête, où la coutume veut qu'on dompte des buffles dans la grande rue de la ville (Marc. Spect. 19 ; Ascon. ad Cic. Fragm. pro C. Cornel.).