Bernard-Hugues de Serrallonga (XIIIe s.)

Fils de Raymond de Serrallonga, il «parait pour la première fois, dit Alart, dans la constitution de paix et trêve que Nunyo Sanche, seigneur souverain de Roussillon et de Cerdagne, fit jurer par toute la noblesse des deux comtés, le 2 octobre 1217. Bernard-Hugues occupa une des premières places parmi les magnats et chevaliers de cette époque et on le voit fréquemment à la cour des souverains du Roussillon ; ainsi, dès l'an 1222, le 11 avril, il figure comme témoin dans une charte de Nunyo Sanche, datée de Perpignan, en faveur de Raymond Cadell, de Puigcerda.

Bernard-Hugues de Serrallonga avait épousé la plus riche héritière du Vallespir, la dame de la baronnie de Cortsavi, Ermessende, fille ainée de Raymond, seigneur de Cortsavi et des territoires actuels de Labastide et de Boule-d'Amont. veuve de Raymond de Termes et déjà mère d'un fils qui fut le fameux capitaine Olivier de Termes. Bernard-Hugues de Serrallonga eut, de son mariage avec Ermessende, trois fils et deux filles, Raymunda et Saurina. La première épousa Raymond de Canet, le plus puissant seigneur du Roussillon.

On trouve Bernard-Hugues de Serrallonga à la cour de Nunyo Sanche, le 17 novembre 1227. Il était à Barcelone le 21 décembre 1228, pour jurer les paix et trêves décrétées par le roi Jacques d'Aragon. On le trouve ensuite le 1er juin 1229, dans l'acte par lequel le vicomte Pierre de Fenouillet fit abandon de sa vicomté à Nunyo Sanche. Il est bien probable qu'il prit part ensuite à l'expédition de la conquête de Majorque avec Nunyo Sanche, bien que son nom ne soit pas cité à cette occasion ; mais le fils de sa femme, Olivier de Termes, figure parmi les combattants. Le 5 mars 1234 Bernard-Hugues de Serrallonga prêta foi et hommage à Hugues, comte d'Empories, pour le château de la Clusa qu'il tenait en fief pour lui. Le 22 janvier 1237, il renonça avec son fils Guillem-Hugues en faveur des Templiers, à tous les droits qu'il avait sur un manse sis à Passa. Cc fut vers la même époque que Bernard-Hugues de Serrallonga prêta serment de fidélité et hommage à son seigneur suzerain, Guillaume, vicomte de Castellnou, pour ses châteaux de Serrallonga et de Mont-Doin qu'il déclara tenir en fief pour le vicomte en lui promettant, comme l'avaient fait ses prédécesseurs, d'être à sa disposition pour les hosts et chevauchées, les cours et plaids de justice. A leur tour, le vicomte de Castellnou et son fils Jaubert, le 17 avril 1241, se reconnurent vassaux de Nunyo-Sanche, souverain de Roussillon, et déclarèrent tenir en fief pour lui, entre autres, «le château de Mont-Doin, celui de Mont-Alba et celui de Serrallonga», avec tous leurs territoires et dépendances «lesquels châteaux, disent-ils, sont tenus en fief pour nous par Bernard-Hugues de Serrallonga». C'est la première mention que l'on connaisse de cette dépendance du baron de Serrallonga à l'égard du souverain du Roussillon, comme seigneur suzerain, et cette reconnaissance eut de graves conséquences pour les successeurs de Bernard-Hugues, car elle servit de prétexte au domaine royal pour opérer six ou sept fois la saisie partielle ou totale de la baronnie de Serrallonga.

Rien ne peut faire mieux juger de l'importance de la famille de Serrallonga à cette époque et de la renommée d'honneur et de droiture de Bernard-Hugues en particulier que les deux faits suivants. Le chevalier Joffre de Céret fit son testament le 12 août 1239 et chargea Bernard-Hugues et son fils Guillem-Hugues d'en faire remplir les dispositions. De même le 22 juillet 1240, le chevalier troubadour Pons d'Ortaffa, après avoir désigné plusieurs exécuteurs testamentaires supplie l'évêque dElne, Bernard-Hugues et ses fils de protéger et défendre sa veuve et ses enfants. Nunyo-Sanche mourut au commencement de l'année 1242, et eut pour successeur le roi Jacques ler d'Aragon, qui fit jurer sa constitution de paix et trêves à Malloles le 15 mars suivant par tous les barons de Roussillon et Cerdagne, parmi lesquels figura Bernard-Hugues de Serrallonga.

Dans le cours de la même année, Bernard-Hugues et ses fils prirent part à une tentative ou expédition de guerre organisée en Roussillon par Raymond de Trancavel, vicomte de Béziers, et par d'autres réfugiés du Languedoc, dans le but de reprendre les biens dont ils avaient été dépossédés à la suite de la croisade contre les Albigeois. Parmi eux figurait en première ligne Olivier de Termes,fils d'Ermessende de Cortsavi. Les exilés furent un instant maîtres de Carcassonne et firent révolter beaucoup de villes des environs ; mais Raymond VII, comte de Toulouse, leur allié, se soumit au roi de France et la révolte n'eut pas d'autres suites qu'un redoublement de persécutions et de confiscations contre les révoltés et leurs complices considérés comme faidits ou hérétiques. Une sentence rendue à Béziers le 21 juillet 1212, par Pierre, archevêque de Narbonne, excommunia le comte de Toulouse et tous ses valedors ou complices, «et nommément Olivier de Termes, Pons d'Olargues, Bernard-Hugues de Serrallonga et tous ses enfants, ainsi que leurs aides et soutiens du Razès, du Narbonnais et du Termenez qui les ont volontairement accueillis».

Outre Olivier, fils d'Ermessende, les autres enfants de Bernard-Hugues et de cette dame sont Guillem-Hugues, Raymond et Arnald, et il n'est pas probable que ce dernier, déjà chanoine d'Elne en 1241, ait pris part à cette guerre et qu'il ait été excommunié comme le reste de sa famille. Malgré cette excommunication, le seigneur de Serrallonga continua de suivre la cour du roi d'Aragon, Jacques le Conquérant, comme il l'avait fait pour celle de Nunyo-Sanche et dès le 6 janvier 1242, on le voit auprès du roi, à Perpignan, en compagnie de Roger, comte de Foix, du vicomte de Béziers et de Bernard de Berga, évêque d'Elne. Le 21 avril 1243, on le trouve encore avec le roi à Montpellier. Le ler mars suivant, il accorda divers privilèges aux habitants de Canet, en qualité de tuteur testamentaire de ses petits-fils Guillaume de Canet et Pierre de Domanova, fils mineurs de Raymond de Canet et de Raymonde de Serrallonga. Bernard-Hugues reçut de Jausbert d'Ille l'aveu féodal de quelques revenus qu'il possédait à Casefabre, le 8 octobre 1245, et quelques jours après, les 23 et 29 octobre, il figura comme témoin dans deux chartes du roi d'Aragon, datées de Perpignan. Le 28 janvier 1250, Bernard-Hugues de Serrallonga fit vente de plusieurs manses à l'abbé d'Arles, et à partir de cette époque nous ne trouvons plus de traces de lui qu'à la suite du roi d'Aragon, à Morelia, le 6 mai 1250 ; à Perpignan, à la fin de novembre 1252 et mars 1253, et, pour la dernière fois, le 8 janvier 1255. On ne sait ensuite plus rien de ce personnage qui, on le voit, dut passer bien peu de temps de son existence dans le manoir de ses ancêtres».

Alart, Notices historiques sur les communes du Roussillon, 2e série.