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I. Je vois, pères conscrits, que tous vos regards sont dirigés sur moi ; je vois que vous êtes préoccupés non seulement du danger qui vous menace vous et la république, mais encore, et n'en existât-il plus d'autre, de celui que je cours (1). Votre intérêt adoucit mes maux et console mes douleurs ; mais, au nom des dieux immortels, bannissez-le de vos coeurs, je vous en conjure, et sans penser à mon salut, songez à vous et à vos enfants. Car pour moi, s'il est dans la destinée de mon consulat de m'imposer toutes les amertumes, tous les chagrins, tous les tourments, je ne les supporterai pas seulement avec courage, mais même avec plaisir, pourvu que la gloire et le salut du sénat et du peuple romain soient le fruit de mes travaux.

Vous voyez en moi, pères conscrits un consul qui n'a jamais cessé d'être exposé à la mort et aux trahisons, ni dans le forum, sanctuaire de toute justice (2) ; ni dans le champ de Mars, consacré par les auspices consulaires (3) ; ni dans le sénat, suprême asile de toutes les nations ; qui n'a pu trouver un abri dans sa maison, refuge assuré pour tous, ni dans la couche où chacun trouve le repos, pas même sur ce siège d'honneur, sur cette chaise curule. Silence (4), résignation, sacrifices (5), rien ne m'a coûté ; j'ai souffert bien des maux pour vous épargner bien des craintes.

Aujourd'hui, si la volonté des dieux immortels me destine, en terminant mon consulat (6), à vous arracher, vous, pères conscrits, et le peuple romain aux horreurs du carnage, vos femmes, vos enfants, les vestales aux plus cruels outrages, les temples, les sanctuaires, cette belle patrie que nous chérissons tous à un affreux incendie, l'Italie entière à la guerre et à la dévastion ; quel que soit le sort que me réserve la fortune, je m'y soumets. En effet, si P. Lentutus a cru, sur la foi des devins, que son nom devait être fatal à la république, pourquoi ne serais-je pas heureux que le destin ait marqué mon consulat pour votre salut ?

II. Ainsi, pères conscrits, songez à vous-mêmes, veillez sur la patrie, sauvez vos personnes, vos femmes, vos enfants, vos biens ; défendez le nom et l'existence du peuple romain ; plus de ménagements, plus d'inquiétudes pour moi. Car d'abord je dois espérer que tous les dieux protecteurs de cette ville accorderont à mes services une légitime récompense ; ensuite, s'il m'arrive malheur, je mourrai sans regret et sans faiblesse. La mort ne peut être, en effet, ni honteuse pour un homme courageux, ni prématurée pour un consulaire (7), ni malheureuse pour un sage. Je n'ai cependant pas un coeur de fer, je ne demeure pas insensible à la vue de la tristesse d'un frère dont je partage la tendre affection (8), et des larmes de tous ceux dont vous me voyez entouré (9). Ma pensée me reporte souvent aussi dans ma maison près d'une femme éperdue, d'une fille tremblante et d'un fils au berceau, que la république semble adopter comme un otage qui Iui répond des actes de mon consulat ; je vois aussi dans cette enceinte un gendre qui attend l'issue de ce grand jour. Oui, ces objets touchent mon âme, mais pour m'inspirer le désir de les sauver avec vous, fût-ce aux dépens de ma vie, plutôt que de les laisser périr avec nous tous, avec la république.

Veillez donc, pères conscrits, au salut de l'Etat ; regardez autour de vous, voyez quels orages vous menacent, si vous ne les conjurez. Ce n'est point un Tib. Gracchus, voulant être une seconde fois tribun du peuple ; ce n'est point un C. Gracchus, s'efforçant de soulever les partisans de la loi agraire ; ce n'est point L. Saturninus, meurtrier de C. Memmius (10), qui sont amenés devant vous et qui attendent l'arrêt de votre sévère justice ; vous tenez dans vos mains les hommes qui sont restés dans Rome pour la livrer aux flammes, pour vous immoler tous, pour ouvrir les portes à Catilina. Vous avez leurs lettres, leurs cachets, leur écriture, enfin l'aveu de chacun des complices : on cherche à séduire les Allobroges ; on soulève les esclaves ; on appelle Catilina ; on forme le projet d'un massacre général, auquel ne survivra pas même un seul de nous pour déplorer l'extinction du nom romain et gémir sur le désastre d'un si grand empire.

III. Tous ces complots vous ont été révélés par des témoins, leurs auteurs les ont avoués, vous-mêmes vous en avez déjà fait connaître plus d'une fois votre jugement (11) : d'abord, lorsque vous m'avez rendu des actions de grâces particulières, en déclarant que mon courage et ma vigilance ont découvert ces complots impies ; ensuite, lorsque vous avez forcé P. Lentulus d'abdiquer la préture, et décidé qu'il serait mis en prison avec ceux que vous aviez jugés coupables ; mais surtout quand vous avez ordonné, en mon nom, des prières publiques, honneur qu'avant moi ne reçut aucun magistrat civil ; enfin, quand hier vous avez décerné de magnifiques récompenses aux députés des Allobroges et à Titus Vulturcius. Tous ces actes ont un tel caractère, que les accusés dont vous avez prononcé la détention paraissent évidemment condamnés par vous.

J'ai cependant voulu, pères conscrits, vous appeler, comme si l'affaire était encore intacte (12), à prononcer votre jugement sur le fait et votre résolution sur le châtiment. Je vous parlerai d'abord comme doit le faire un consul. Je voyais depuis longtemps de coupables fureurs couver au sein de la république et préparer l'explosion de malheurs inconnus ; mais que des citoyens formassent une si vaste, une si funeste conjuration, je ne l'aurais jamais pensé. Maintenant, quoi qu'il en soit, et de quelque côté que penchent vos sentiments et vos opinions, il faut vous prononcer avant la nuit (13). Vous voyez l'énormité du crime qu'on vous dénonce. Si vous croyez qu'il ne s'y rattache qu'un petit nombre de complices, vous êtes dans une grande erreur. Le mal s'étend plus loin qu'on ne pense ; il n'a pas seulement infecté l'Italie, il a aussi franchi les Alpes, et, continuant sa marche secrète, envahi déjà plusieurs provinces. En triompher par la patience, par les lenteurs, c'est impossible. Quelque remède que vous choisissiez, dans la promptitude seule est le succès.

IV. Je vois jusqu'à présent deux opinions en présence : celle de D. Silanus (14), qui juge dignes de la mort ceux qui ont voulu détruire la république ; celle de C. César (15), qui, rejetant la peine de mort, adopte toute la rigueur des autres supplices. Tous deux, ainsi que le veulent leur rang et l'énormité du crime, font preuve de la dernière sévérité. Le premier ne pense pas que des hommes qui ont voulu nous arracher la vie à tous, exterminer le peuple romain, renverser l'empire, effacer du monde le nom de Rome, doivent jouir un seul instant de la lumière et de l'air que nous respirons ; il nous rappelle que la république a souvent frappé du dernier supplice (16) des citoyens coupables. Le second se fait cette idée de la mort, que les dieux immortels ne l'ont point établie comme un châtiment pour le crime, mais comme une loi de la nature et un repos après les misères de la vie (17). Aussi le sage la voit-il toujours approcher sans regret, et l'homme courageux souvent avec plaisir. Mais les fers, les fers pour toujours, furent inventés sans aucun doute pour la punition expresse de quelque crime épouvantable. Il veut qu'on distribue les condamnés dans les villes municipales. Si l'on veut forcer celles-ci de les recevoir, on commet une injustice (18) ; si on les en prie, on aura peine à l'obtenir. Prononcez toutefois cet arrêt, si vous le jugez à propos (19). Je prends sur moi de chercher, et je trouverai, je l'espère, des villes qui ne croiront pas de leur honneur de se refuser à une mesure que vous aurez prise pour le saint de tous. César prononce en outre des peines sévères contre tout habitant qui briserait les fers des coupables : il les entoure de gardes formidables et défend, par une rigueur bien légitime envers ces hommes pervers, que personne, après leur condamnation, ne puisse demander au sénat ou au peuple de l'adoucir ; il leur ôte jusqu'à l'espérance, unique consolation des malheureux. Il ordonne encore la confiscation de leurs biens ; il ne laisse à ces scélérats que la vie, parce que s'il la leur arrachait, il les délivrerait, par un instant de souffrance, de toutes les douleurs de l'esprit et du corps, de tous les tourments du crime. Aussi, pour inspirer dans cette vie quelque terreur aux méchants, les anciens ont-ils voulu qu'il y eût dans les enfers des supplices réservés aux impies : ils comprenaient qu'affranchie de cette crainte, la mort même n'avait plus rien de redoutable.

V. Maintenant, pères conscrits, je vois quel est mon intérêt. Si vous adoptez l'avis de C. César, comme il a toujours suivi dans sa vie publique la route qu'on regarde comme celle des amis du peuple (20), peut-être aurai-je moins à redouter les orages populaires pour un décret qu'il aura proposé, qu'il aura soutenu lui-même (21) ; si vous vous rangez, au contraire, à l'opinion de Silanus, je ne sais s'il n'en résultera pas de plus graves embarras pour moi. Au reste, l'intérêt public doit l'emporter sur mes dangers personnels. C. César, par un vote digne de son rang et de sa glorieuse naissance, nous donne le gage de son attachement inébranlable à la république. Il nous a fait comprendre quelle distance sépare le futile harangueur qui flatte le peuple et l'orateur vraiment populaire qui songe à le sauver.

Je sais tel de ces hommes jaloux de passer pour amis du peuple, qui ne siège pas au milieu de vous, sans doute afin de ne pas porter une sentence de mort contre des citoyens romains. Et il les a fait mettre en prison, il y a trois jours, et il a voté des actions de grâces en mon nom, et il décernait hier aux délateurs de magnifiques récompenses. Or, celui qui a décrété la prison pour les accusés, des félicitations pour le magistrat instructeur (22), des récompenses pour les délateurs, ne laisse de doute à personne sur la façon dont il juge le fond même de la cause. Quant à C. César, s'il sait que la loi Sempronia (23) fut établie en faveur des citoyens romains, il sait aussi que celui qui s'est fait l'ennemi de la patrie ne peut plus être un citoyen, et qu'enfin l'auteur lui-même de cette loi fut puni par l'ordre du peuple (24) de ses attentats contre la république. Il ne pense pas non plus que Lentulus, malgré ses largesses et ses prodigalités, puisse être appelé l'ami du peuple, lorsqu'il a, sans frémir, conçu le dessein si barbare d'égorger tous les citoyens et d'anéantir cette ville. Aussi, quoique le plus doux et le plus clément des hommes, il ne balance pas à plonger pour toujours P. Lentulus dans les ténèbres et dans les fers, il menace du châtiment de la loi quiconque voudrait plus tard se faire un titre de la grâce du coupable et se rendre populaire au risque de perdre le peuple romain. Il prononce en outre la confiscation des biens de P. Lentulus, afin qu'à tous les tourments de l'âme et du corps s'ajoutent aussi l'indigence et la misère.

VI. Ainsi donc, en vous rangeant à cette opinion, vous associerez à ma cause devant l'assemblée un homme cher et agréable au peuple ; en préférant celle de Silanus, il sera facile de nous justilier tous du reproche de cruauté, car l'on m'accordera que c'est le châtiment le plus doux. Au reste, pères conscrits, quelle cruauté peut-on commettre quand il s'agit de punir un crime si horrible ? J'en juge, en effet, par ce que je ressens. Puissé-je ne jamais jouir avec vous du salut de la république, si l'extrême sévérité que je montre dans cette cause, bien loin de venir de l'inflexibilité de mon âme (y a-t-il quelqu'un de plus doux que moi ?) n'est pas plutôt la preuve d'un profond sentiment d'humanité et de pitié. Je crois voir, en effet, cette ville (25), la lumière du monde, le rempart de toutes les nations, disparaissant tout à coup dans un vaste embrasement ; je me représente sous les cendres de la patrie nos malheureux citoyens entassés sans sépulture ; j'ai devant les yeux l'image de Céthégus, et je le vois assouvir sa fureur dans votre sang. Mais quand je me figure Lentulus revêtu de cette royauté dont il avoue avoir fondé l'espérance sur des oracles, un Gabinius honoré de la pourpre (26), Catilina reçu dans Rome avec son armée ; alors je songe avec horreur aux cris lamentables des mères, à la fuite des jeunes filles et des enfants, aux outrages subis par les vestales, et c'est parce que je trouve ces malheurs cruels et déplorables, que je montre une rigueur externe contre ceux qui ont voulu les amasser sur nous. Je vous le demande, en effet, si un père de famille voyait ses enfants assassinés par un esclave, sa femme égorgée, sa maison livrée aux flammes, et ne lui faisait pas subir le plus terrible supplice, passerait-il pour clément et humain, ou ne serait-il pas regardé comme le plus barbare et le plus cruel des hommes ? Pour moi, je croirais sans coeur et sans entrailles celui qui ne chercherait pas dans la douleur et les tourments du coupable un adoucissement à sa douleur et à ses tourments. Nous aussi, pères conscrits, en nous montrant impitoyables envers des hommes qui ont voulu nous massacrer avec nos femmes et nos enfants, qui se sont efforcés de détruire à la fois et la demeure de chacun de nous et le siége de la république entière, qui ont voulu établir les Allobroges sur les ruines de Rome, sur les cendres fumantes de l'empire, nous paraîtrons humains ; mais si nous voulons être trop indulgents, nous n'échapperons pas au reproche d'une insensibilité cruelle pour les désastres de la patrie et les maux de nos concitoyens.

Est-ce que L. César, cet homme si courageux et si dévoué à la république, a semblé trop cruel, lorsqu'il a dit, il y a trois jours, que l'époux de sa soeur (27), femme d'un mérite si distingué, devait être mis à mort, lorsqu'il l'a dit devant lui ? lorsqu'il a rappelé que son aïeul (28) avait péri par l'ordre du consul avec son fils jeune encore, qu'il avait chargé d'une mission, et qui fut tué dans la prison ? Et ces hommes, qu'avaient-ils fait de comparable à ce que nous voyons ? Avaient-ils formé le projet d'anéantir la république ? C'étaient des largesses promises (29), c'était une lutte de partis, qui troublaient alors la république. A cette époque, l'illustre aïeul de Lentulus (30) poursuivit Gracchus les armes à la main ; il reçut même une grave blessure en repoussant toute atteinte aux droits de la république et c'est pour la renverser de fond en comble que son petit-fils amène à sa suite les Gaulois, qu'il soulève les esclaves, qu'il appelle Catilina, qu'il charge Céthégus d'égorger les sénateurs, Gabinius de massacrer les autres citoyens, Cassius de livrer Rome aux flammes, Catilina de désoler et de piller l'Italie entière. Ne craignez pas, croyez-moi (31), de paraître trop sévères en face d'un attentat aussi impie ; craignez bien plutôt de vous montrer cruels envers la patrie par l'indulgence de votre arrêt ; nul n'accusera votre rigueur, si vous frappez d'une peine terrible nos plus mortels ennemis.

VII. Toutefois, pères conscrits, je ne puis me taire sur ce que j'entends dire autour de moi. Certaines paroles arrivent à mon oreille ; on semble craindre que les moyens ne me manquent pour exécuter le décret que vous porterez aujourd'hui. Tout est prévu, tout est préparé, tout est arrêté, pères conscrits, moins encore par mes soins attentifs et mon extrême vigilance, que par la ferme volonté du peuple romain, décidé à conserver son souverain empire, ainsi que la fortune de tous les citoyens. Autour de nous sont réunis des hommes de tous les ordres et de tous les âges ; ils remplissent le forum, les temples environnants, toutes les avenues qui conduisent à cette enceinte. C'est que cette cause est la seule, depuis la fondation de Rome, qui ait réuni tous les coeurs, à l'exception de ces hommes qui, voyant leur perte inévitable, ont mieux aimé nous entraîner tous dans leur chute que de succomber seuls.

Je les excepte et je les mets volontiers à part ; car, loin même que je les range dans la classe des mauvais citoyens, je vois en eux nos plus cruels ennemis. Quant aux autres, dieux immortels ! quelle affluence, quel zèle, quel courage pour la gloire et le salut de la république ! Que dirai-je ici des chevaliers romains, qui, sans vous contester la prééminence du rang, la supériorité du conseil (32), rivalisent avec vous de dévouement pour la patrie ? Réunis et réconciliés avec le sénat après de longues années de dissensions (33), Ils s'associent à vous en ce jour pour défendre la même cause. Si cette union, affermie sous mon consulat, devait durer toujours, désormais, je vous l'assure, la république n'aurait plus à craindre aucun trouble intérieur, aucune discorde domestique. Je vois amenés ici, par un semblable zèle pour la défense commune, les tribuns du trésor (34), ces courageux citoyens ; j'y vois aussi tous les secrétaires (35), qui réunis par hasard au trésor public pour le tirage au sort (36), négligent tout pour ne songer qu'au salut général.

Nous avons autour de nous tous les hommes libres, même ceux des rangs les plus obscurs. Quel est, en effet, le citoyen pour qui ces temples, l'aspect de cette ville, la possession de la liberté, cette lumière même qui nous éclaire, cette terre de la patrie, ne soient des biens aussi précieux qu'ils sont doux et pleins de charme ?

VIII. Il est juste, pères conscrits, de louer l'ardeur des affranchis ; ces hommes qui ont acquis par leur mérite le droit de cité (37), regardent comme leur véritable patrie cette ville que d'autres, nés dans son sein, et issus du plus haut rang (38), n'ont pas traitée comme leur mère, mais comme une ennemie. Que parlé-je des affranchis ? l'intérêt de leur fortune, leur droit de citoyens, l'amour enfin de la liberté, le plus doux des biens, les animent la défense de la patrie. Il n'est pas un esclave, pour peu que sa condition soit tolérable (39), qui n'ait horreur de cette audacieuse tentative, qui ne désire la conservation de la république, et ne concoure de tous ses voeux (40) et de tout son pouvoir au salut commun.

Que personne ne s'alarme donc du bruit qu'on a répandu, qu'un vil agent de Lentulus (41) parcourt les boutiques dans l'espoir de séduire à prix d'argent des citoyens pauvres et confiants ; cette tentative a été faite, il est vrai, mais il ne s'est pas trouvé d'hommes assez malheureux ou assez pervers pour ne pas vouloir sauver cet asile où le travail fournit à leurs besoins journaliers, cet abri de leur famille, leur lit, le calme enfin de leur paisible vie. Le plus grand nombre de cette classe industrieuse, ou, pour mieux dire, cette classe tout entière n'aime rien tant que la tranquillité. Tous les profits de son travail, tous ses moyens d'existence, ont besoin pour être assurés d'une grande population ; la paix seule alimente l'industrie. Si ces avantages diminuent quand les ateliers sont fermés (42), que serait-ce s'ils devenaient la proie des flammes ?

Ainsi, pères conscrits, les secours du peuple romain ne vous manquent point ; prenez garde qu'on ne croie pas que vous manquez au peuple romain.

IX. Vous avez un consul qui a échappé à des dangers, à des pièges, à la mort même, moins pour conserver ses jours, que pour sauver les vôtres ; tous les ordres, rivalisant de courage et de zèle, n'ont qu'une âme, qu'une volonté, qu'une voix pour le salut de la république ; menacée de la flamme et du fer par une conjuration impie, la patrie suppliante tend vers vous ses mains ; elle vous implore pour elle-même, elle vous recommande la vie de tous les citoyens, la citadelle, le Capitole, les autels des dieux Pénates, le feu éternel et sacré de Vesta, les temples et les sanctuaires des divinités, les murs et les maisons de Rome. Enfin c'est sur votre vie, sur celle de vos femmes et de vos enfants, sur la fortune, sur les biens, sur le foyer de chaque citoyen (43) que vous allez prononcer aujourd'hui.

Vous avez un chef qui ne s'occupe que de vous sans songer à lui-même, ce qui est un avantage bien rare ; vous avez, ce qui se voit aujourd'hui pour la première fois dans une cause politique, tous les ordres, tous les citoyens, le peuple romain tout entier uni dans un même sentiment. Songez que de travaux il a fallu pour fonder cet empire ; que de courage pour y affermir la liberté ; quelle protection divine pour en étendre et en agrandir la puissance, et une seule nuit a failli tout détruire. Il faut empêcher aujourd'hui que jamais, à l'avenir, de mauvais citoyens ne puissent, je ne dis pas accomplir mais seulement former de semblables projets. Et si je vous tiens ce langage, ce n'est pas pour exciter votre zèle, qui prévient, pour ainsi dire, le mien, mais pour remplir mon devoir de consul, qui veut que ma voix se fasse entendre la première à la république.

X. Maintenant, pères conscrits, avant de revenir à l'objet de la délibération, je vous parlerai quelques instants de moi-même. Je vois que je me suis fait autant d'ennemis qu'il y a de conjurés, et vous savez qu'ils sont nombreux ; mais ce n'est, à mes yeux, qu'une foule vile et impuissante, méprisable et abjecte. Et si un jour, poussée par l'audace criminelle de quelque factieux, elle venait à prévaloir contre votre autorité et contre celle de la république, jamais cependant, pères conscrits, je ne me repentirai de ma conduite ni de mes conseils. En effet, la mort, dont peut-être ils me menacent, est le partage de tous les hommes ; mais la gloire dont vos décrets m'ont honoré n'a été donnée qu'à moi seul. Vous avez décerné des actions de grâces à d'autres pour avoir bien servi la république ; je suis le premier qui en reçoive pour l'avoir sauvée.

Illustrons la mémoire du grand Scipion (44), dont le génie et la valeur forcèrent Annibal de retourner en Afrique et d'abandonner l'Italie ; payons un magnifique tribut d'éloges au second Africain (45), qui détruisit deux villes, les ennemies les plus acharnées de notre empire, Carthage et Numance ; regardons comme un héros L. Paul Emile, dont Persée, ce monarque si puissant autrefois et si renommé, décora le triomphe (46) ; éternisons la gloire de Marius, qui deux fois délivra l'Italie de l'invasion et de la crainte de la servitude (47). Plaçons au-dessus de tous ces héros Pompée, dont les exploits et les vertus n'ont d'autres limites que celles où s'arrête la course du soleil. Au milieu de ces gloires, la mienne trouvera sans doute une place, à moins qu'il ne soit plus beau d'ouvrir des provinces où nous puissions nous retirer, que de conserver à nos soldats absents et victorieux une patrie qui les reçoive après leur triomphe (48).

Il est vrai que les victoires sur l'étranger ont un avantage sur celles que l'on remporte dans les guerres domestiques ; les ennemis du dehors, s'ils sont subjugués, deviennent nos esclaves ; s'ils sont reçus en grâce (49), ils se croient enchaînés par la reconnaissance ; mais quand des citoyens, égarés par le délire, se sont une fois déclarés les ennemis de leur patrie, lors même que vous aurez sauvé la république de leurs coups, vous ne pourrez ni les dompter par la force, ni les désarmer par la clémence. Je sais donc bien que je m'engage dans une guerre éternelle avec les mauvais citoyens ; mais appuyé sur votre secours et celui de tous les gens de bien, fort du souvenir de nos dangers. souvenir qui ne se conservera pas seulement dans la mémoire de ce peuple que j'aurai sauvé, mais qui se perpétuera dans les annales et dans la reconnaissance de toutes les nations, je suis sûr d'écarter facilement le péril et de moi et des miens. Non, jamais aucune force ne prévaudra contre l'union du sénat et des chevaliers romains, et ne pourra rompre ou affaiblir cette puissante ligue de tous les hommes de bien.

XI. Ainsi, pères conscrits, pour le sacrifice que j'ai fait du commandement (50) d'une armée et d'une province, pour le triomphe et les autres distinctions glorieuses auxquelles j'ai renoncé, afin de veiller sur Rome et sur votre salut à tous ; pour ces liaisons de clientèle et d'hospitalité dans les provinces, liaisons que dans la ville même je cultive (51) avec autant de soin que je les recherche ; pour tous ces avantages perdus, pour mon dévouement sans bornes à vos intérêts, pour ma vigilance dont le salut de la république vous montre les effets, je ne vous demande rien autre chose que de conserver la mémoire de cet événement et de tout mon consulat ; tant qu'elle restera gravée dans vos âmes, je me croirai entouré du rempart le plus sûr. Que si la puissance des méchants trompait mon espoir et triomphait de mes efforts, je vous recommande mon fils encore enfant ; sa vie je n'en doute pas, ses honneurs mêmes seront assurés, si vous n'oubliez pas qu'il est le fils de celui qui se dévoua seul pour tout sauver.

Vous allez donc décider de votre sort, pères conscrits, du sort du peuple romain, de vos femmes et de vos enfants, de la conservation de vos autels et de vos foyers (52), des sanctuaires et des temples, des édifices de Rome et de vos maisons, de l'empire, de la liberté, du salut de l'Italie et de la république entière ; ainsi prononcez avec la réflexion et la fermeté que vous avez déjà fait paraître. Vous avez un consul qui ne balancera pas dans son obéissance à vos décrets, et qui saura toute sa vie les défendre et en assurer par lui-même l'exécution.


(1)  Si id depulsum sit, de meo periculo... Cicéron n'exprimait qu'un bien juste pressentiment de la haine qu'il allait soulever contre lui, s'il se rangeait à l'avis de Silanus, puisque, quelques années plus tard, les partisans de Catilina, dont Clodius était le chef, ayant repris le dessus, il fut banni de Rome, sous le prétexte qu'il avait fait exécuter les conjurés sans jugement.

(2)  In quo omnis aequitas continetur. C'était sur le forum que les Romains tenaient la plupart de leurs assemblées politiques, et qu'ils traitaient aussi de leurs affaires particulières les plus importantes. C'était là que le préteur urbain avait un tribunal permanent où il tenait ses audiences.
Le forum était une grande place carrée, presque régulière, mais moitié plus longue que large, qui s'étendait entre le mont Palatin et le mont Capitolin. Tout autour s'élevaient des temples, des basiliques, des arcs de triomphe ; au milieu, des autels, des colonnes, des statues.

(3)  Auspiciis consularibus. Les comices consulaires, convoqués par centuries, se tenaient dans le Champ de Mars et ne s'ouvraient jamais que par la cérémonie des auspices. Ce préliminaire était exigé aussi pour les comices par curies, qui ne pouvaient se réunir non plus que dans le Champ de Mars ; mais les comices par tribus en étaient affranchis, et pouvaient se tenir indifféremment, soit au forum, soit sur la place du Capitole, soit dans le Champ de Mars, soit au cirque Flaminius (Voir, dans le premier discours contre Catilina, la note relative aux différentes sortes de comices).

(4)  Multa tacui. Cette réticence semble s'appliquer à plusieurs personnages puissants que la rumeur publique accusait d'être favorables aux projets des conjurés, tels que Crassus, César et quelques autres encore.

(5)  Multa concessi. Cicéron, pour détacher Antoine du parti de Catilina, lui avait cédé la province de la Macédoine ; c'est sans doute à cette circonstance qu'il fait allusion.

(6)  Exitum consulatus mei. Nous avons dit que ce discours avait été prononcé aux nones de décembre, qui tombaient le 5 de ce mois, et que les nouveaux consuls devaient entrer en charge le 1er janvier suivant.

(7)  Neque immatura consulari. Arrivé au faîte des honneurs, il avait assez vécu pour sa gloire.

(8)  Fratris carissimi. Quintus Cicéron qui, suivant Plutarque, avait d'abord poussé son frère à réclamer le supplice des conjurés, s'était, après le discours de César, rangé à l'avis de Silanus et avait, comme beaucoup d'autres, voté contre la peine de mort et demandé seulement la prison.

(9)  Horum omnium. Tous les sénateurs amis de Cicéron se pressaient en ce moment autour de lui, pour lui représenter les dangers auxquels il s'exposerait par une sévérité trop inflexible.

(10)  C. Memmius avait été tué par L. Saturninus, tribun du peuple, qui redoutait de le voir arriver au consulat.

(11)  Multis jam judiciis. Cicéron caractérise ainsi diverses circonstances par lesquelles s'était manifesté le jugement que le sénat portait sur la conjuration et sur ses auteurs.

(12)  Tanquam integrum. Comme si l'affaire était encore entière, intacte, c'est-à-dire comme si vous n'aviez pas déjà prononcé sur le fait (Burnouf).

(13)  Ante noctem. Cicéron ne pressait probablement ainsi le vote des sénateurs, que pour prévenir les tentatives qui pouvaient être faites pendant la nuit pour la délivrance des prisonniers. Toutefois quelques commentateurs rappellent à propos de ce passage que, suivant Varron, un sénatus-consulte prononcé avant le lever ou après le coucher du soleil n'aurait pas été valable.

(14)  ;D. Silani. D. Silanus avait fait connaître le premier son opinion, à titre de consul désigné ; c'était un privilège accordé à cette dignité, de même qu'à celle de prince du sénat. Les autres personnages consulaires donnaient ensuite leur avis par ordre d'ancienneté.

(15)  C. Caesaris. César, alors préteur désigné, avait plaidé contre la peine de mort avec tant d'éloquence et d'habileté, qu'il avait ramené à son opinion un très grand nombre de sénateurs, parmi lesquels D. Silanus lui-même et Quintus Cicéron, le frère du consul.

(16)  Hoc genus poenae. Pour en trouver des exemples, il fallait remonter jusqu'à une époque antérieure à la loi Porcia, qui avait garanti d'une manière certaine la vie et la liberté des citoyens romains.

(17)  Aut laborum... quietem esse. On peut voir dans Salluste (Cat, ch. LI) le développement de cette pensée empruntée par César à la doctrine d'Epicure, pour le besoin de sa cause.

(18)  Iniquitatem. Les villes municipales ayant, en effet, leurs lois propres et leurs magistrats particuliers, la proposition de César leur imposait une obligation injuste et les menaçait d'un grave danger en les constituant ainsi, sous leur responsabilité, gardiennes des conjurés.

(19)  Decernatur tamen, si placet. Cette concession faite à l'opinion de César, dont elle suppose le triomphe, semblerait, au premier abord, accuser l'habileté de Cicéron, si l'on ne voyait pas au contraire un peu plus loin tout le parti qu'il tire de ces ménagements mêmes. C'est, en effet, en supposant que César n'a pas proposé la peine de mort, parce qu'il la trouvait trop douce, que Cicéron se trouve en droit de conclure que si l'on ôte la vie aux conjurés, César ne pourra pas trouver leur punition trop cruelle.

(20)  Quae popularis habetur. Cicéron (oratio pro Sextio) partage en deux classes les magistrats dont l'ambition aspire aux premiers rangs, suivant qu'ils s'attachent à flatter les passions de la multitude ou celles des grands. Il appelle les premiers populares et les seconds optimates.

(21)  Auctore et cognitore. On donnait le nom d'auctor à celui qui exprimait le premier une opinion, et de cognitor à celui qui se chargeait de défendre la cause d'une personne présente. Le procurator était celui qui parlait pour un absent.

(22)  Quaesitori. On appelait quésiteurs ou questeurs les magistrats chargés par le peuple de l'instruction et de la poursuite d'une affaire criminelle. C'était ordinairement aux consuls que l'on confiait ce soin.

(23)  Legem Semproniam. Loi proposée par C. Sempronius Gracchus, et d'après laquelle le peuple seul avait le droit de condamner à mort un citoyen romain.

(24)  Jussu populi. Cette assertion, qui fournissait un puissant argument à la cause, n'était pas exactement conforme à la vérité ; le peuple n'avait pas ordonné la mort de C. Gracchus ; seulement il n'avait rien fait pour s'y opposer et pour le défendre lorsqu'il fuyait devant l'attaque de ses ennemis et qu'il réclamait du secours (Voyez Plutarque).

(25)  Videor enim mihi... videre. César avait dit ironiquement qu'on avait fait de magnifiques lieux communs sur les horreurs de la guerre civile (Sall, Cat., ch. LI). Cicéron semble s'attacher à rendre tout leur éclat aux tableaux que César avait mis tous ses efforts à effacer.

(26)  Purpuratum esse hunc Gabinium. Gabinius était le plus intime ami de Lentulus. Celui-ci, en arrivant au pouvoir, n'aurait pas manqué de l'élever à l'une des dignités dont la pourpre était l'insigne distinctif.

(27)  Sororis suae ... virum. Julie, soeur de César, après la mort de son premier mari M. Antonius Créticus, avait épousé P. Cornélius Lentulus.

(28)  Avum. Cet aïeul était Fulvius Flaccus, compagnon de C. Gracchus. Trouvé avec l'aîné de ses fils dans la retraite où il s'était réfugié après le massacre de ses partisans, il y fut mis à mort avec ce fils.

(29)  Largitionis voluntas. On sait que C. Gracchus demandait le partage des terres et la distribution du blé au peuple.

(30)  Hujus avus Lentuli. C'était P. Lentulus, consulaire et prince du sénat, qui avait combattu contre C. Gracchus pour le parti de la noblesse.

(31)  Veremini, censeo. Il n'est pas besoin de faire ressortir ici l'ironie.

(32)  Summam ordinis consiliique. C'est-à-dire le premier rang dans les trois ordres et la plus grande part d'autorité dans les délibérations.

(33)  Ex dissensione. C. Gracchus avait enlevé aux sénateurs, pour le donner aux chevaliers seuls, le droit de siéger dans les tribunaux, puis Sylla, vainqueur du parti populaire, l'avait fait rentrer dans les mains des premiers. De là, entre les deux ordres, la mésintelligence et les dissensions continuelles, véritables causes des guerres de Marius et de Sylla.

(34)  Tribunos aerarios. Les tribuns du trésor touchaient les sommes nécessaires à l'entretien des armées et à la paie des soldats, et les versaient entre les mains des questeurs. Ils appartenaient à l'ordre des plébéiens et étaient admis à prendre part aux jugements.

(35)  Scribas. Les scribes ou greffiers qui transcrivaient les actes publics, les lois et les décisions des magistrats, étaient en grande partie des affranchis, et cependant ils formaient une classe qui jouissait d'une certaine considération.

(36)  Ab exspectatione sortis. Les scribes tiraient au sort les magistrats auxquels ils devaient être attachés l'année suivante. Il paraît qu'ils se trouvaient réunis ce jour-là pour cet objet.

(37)  Qui... fortunam hujus civitatis consecuti. Le droit de cité était la plus grande faveur que le peuple romain pût accorder, soit aux particuliers, soit aux peuples étrangers ; c'était toujours la récompense d'un grand service ou d'un dévouement éprouvé. Ceux qui le recevaient étaient assimilés en tout aux citoyens romains, ou, pour mieux dire, devenaient réellement citoyens romains.

(38)  Summo nati loco. Lentulus et Catilina étaient issus l'un et l'autre de familles patriciennes.

(39)  Tolerabili conditione servitutis. Il y avait parmi les esclaves de grandes différences de condition, suivant les diverses fonctions qu'ils étaient appelés à remplir, depuis celles de la plus basse domesticité, jusqu'à celles qui exigeaient des talents distingués ; car c'était ordinairement parmi eux que l'on choisissait les pédagogues, les secrétaires, les copistes. etc.

(40)  Quantum audet. Les esclaves, en effet, n'ayant pas le droit d'intervenir dans une cause qui n'intéressait que les citoyens seuls, ne devaient que former des voeux ; ils ne pouvaient rien par eux-mêmes.

(41)  Lenonem quemdam Lentuli. Voyez Salluste (Cat, ch. L). Appien raconte aussi que, pendant la séance même du sénat, les esclaves et les affranchis de Lentulus et de Céthégus formèrent des attroupements autour des maisons dans lesquelles les accusés étalent détenus, dans le dessein de les enlever ; mais que Cicéron, averti sur-le-champ, courut avec des troupes assurer la garde des prisonniers, et revint ensuite au sénat pour presser leur jugement.

(42)  Occlusis tabernis. Dans les moments de trouble comme dans les jours de deuil public, les boutiques devaient être fermées.

(43)  Focis vestris. Les dieux Pénates étaient représentés par des statuettes de pierre, de bois ou d'argent. On les gardait, dans les maisons ordinaires, sous les portiques de l'atrium, ou quelquefois dans la chambre à coucher. Chez les pauvres, leur place était dans la cuisine, au foyer domestique, qui constitue essentiellement la demeure du citoyen. Dans les habitations opulentes, on leur consacrait un oratoire, un sacrarium.

(44)  Scipio. P. Cornélius Scipion, le premier Africain, qui mit fin à la seconde guerre punique.

(45)  Alter Africanus. Le second Africain, fils de L. Aemilius Paulus, d'où il avait pris le nom de Scipion Emilien, après son adoption par le fils du premier Scipion. Ce fut le destructeur de Carthage et de Numance.

(46)  Cujus currum. L. Aemilius Paulus, après sa conquête de la Macédoine, amena à Rome le roi Persée prisonnier, et le fit marcher chargé de chaînes devant son char de triomphe.

(47)  Metu servitutis bis liberavit. La première fois par la défaite des Teutons dans la Gaule Narbonnaise, et la seconde par celle des Cimbres en Italie.

(48)  Quo victores revertantur. Allusion à un mot de Pompée lui-même, rapporté ailleurs par Cicéron, De officiis, 1, 22 : Mihi quidem Pompeius hoc tribuit, ut diceret, frustra se triumphum tertium deportaturum fuisse, nisi meo in rempublicam beneficio, ubi triumpharet, esset habiturus.

(49)  Aut recepti. Sous-entendu in gratiam.

(50)  Pro imperio. Cicéron, comme nous l'avons dit plus haut (note 5), dans l'espoir de détacher Antoine du parti de Catilina, lui avait cédé la riche et brillante province de Macédoine que le sort lui avait donnée. Il avait certainement perdu, par ce sacrifice fait à l'intérêt public, tous les avantages dont il parle, et il était bien en droit de s'en faire un titre à la reconnaissance de ses concitoyens. En échange de la Macédoine, il devait passer au gouvernement de la Gaule Cisalpine, mais il y avait aussi renoncé et l'avait fait donner au préteur Métellus Céler.

(51)  Urbanis opibus. Suivant le témoignage de Plutarque, Cicéron réunissait autour de lui une plus grande foule de clients et d'amis que les citoyens les plus riches et les plus puissants.

(52)  De aris ac focis. Ces mots, opposés à ceux de fanis ac templis, ne doivent s'appliquer qu'aux demeures particulières.