Livre X - Lettres 115 et 116


PLINE A L'EMPEREUR TRAJAN

La loi Pompéia, seigneur, permet aux villes de Bithynie de donner le droit de bourgeoisie à qui bon leur semble, pourvu que ce soient des citoyens, non d'une ville étrangère, mais de quelque autre ville de la province. La même loi énonce les raisons qui autorisent les censeurs à chasser quelqu'un du sénat, et il n'y est point fait mention de celui qui n'est pas citoyen du lieu. Quelques censeurs ont pris de là occasion de demander s'ils devaient chasser un homme qui était citoyen d'une autre ville que de la province. J'ai cru, seigneur, qu'il fallait savoir vos intentions sur cette affaire ; parce que si la loi défend d'agréger un citoyen qui n'est pas d'une ville de la province, aussi elle n'ordonne pas que l'on chasse du sénat celui qui n'est pas citoyen. D'ailleurs, plusieurs personnes m'ont assuré qu'il n'y avait point de ville où il ne se trouvât grand nombre de sénateurs dans ce cas, et que l'on troublerait beaucoup de villes et de familles, sous prétexte d'une loi qui, dans ce chef, semblerait depuis longtemps abolie par un consentement tacite.

TRAJAN A PLINE

C'est avec raison, mon très cher Pline, que vous avez balancé sur la décision de la question qui vous a été proposée par les censeurs, s'ils pouvaient choisir, pour sénateurs, des citoyens d'autres villes que de la leur, mais de la même province. Car vous pouviez être entraîné d'un côté par l'autorité de la loi, et de l'autre par l'ancienne coutume qui avait prévalu. Voici le tempérament que je crois devoir être pris. Ne touchons point au passé, laissons dans leur état ceux qui ont été faits sénateurs, quoique contre la disposition de la loi, et de quelque ville qu'ils soient. Mais suivons exactement, à l'avenir, la loi Pompéia, dont nous ne pourrions faire remonter l'observation aux temps passés, sans causer beaucoup de troubles.

© Agnès Vinas

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