XX - C. Licinius Stolon (an de Rome 386 à 387)

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Fabius Ambustus (1) avait deux filles. Il maria la cadette à Licinius Stolon (2), plébéien ; l'aînée, à Aulus Sulpicius, patricien. La première, étant allée un jour rendre visite à sa soeur, dont le mari exerçait, comme tribun militaire, un pouvoir égal à celui des consuls (3) témoigna un effroi ridicule au bruit des faisceaux dont les licteurs frappèrent la porte de ce magistrat. Sa soeur n'ayant pu s'empêcher de rire de son épouvante, elle en porta ses plaintes à son mari. Celui-ci ne fut pas plutôt créé tribun du peuple, par le secours de son beau-père, qu'il porta une loi qui ordonnait que l'un des deux consuls serait tiré du peuple. En vain Appius Claudius s'y opposa : Licinius Stolon fut le premier d'entre les plébéiens qui obtint la dignité consulaire. Le premier usage qu'il fit de son autorité fut de porter une loi qui défendait à tous les plébéiens de posséder, chacun, plus de cinq cents arpents de terre (4). Comme il en possédait lui-même un pareil nombre, et autant au nom de son fils qu'il avait émancipé (5), il fut appelé en jugement, et condamné à payer l'amende imposée par la loi qu'il avait portée (6).


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(1)  On appelait proprement ambusti ceux qui avaient été frappés de la foudre sans en être tués, comme ce M. Fabius qu'un coup de tonnerre toucha au bas des reins ; événement qui lui fit donner le nom de favori de Jupiter, et le surnom d'Ambustus, que porta aussi sa famille.

(2)  Stolo est un mot emprunté d'une opération rurale. Il fut donné à Licinius et à sa famille, parce qu'il fut le premier qui retrancha des arbres les branches inutiles qu'on nommait stolones, à cause de leur stérilité, stolida fructificatione.

(3)  La charge de tribun militaire, différente de celle de tribun légionnaire, remplaça pendant près de soixante-dix ans la magistrature consulaire. «On créa dix tribuns militaires», dit Tite-Live, 1.3, ch. 51. Eutrope dit aussi, 1.11, ch.1: «A la place des deux consuls, on créa des tribuns militaires avec l'autorité consulaire».

(4)  Les anciennes éditions portent plus centum, ensuite centum quinquaginta. Comme les manuscrits n'étaient là-dessus d'aucun secours à Schott, il a rétabli quinginta dans les deux endroits, conformément à Tite-Live et à Valère Maxime. Les éditions de Pitiscus et de Juncker offrent aussi quinginta. Selon Artnzen, il faut d'abord lire centum, et peu après quinginta centum. Centum, dit-il, se trouve dans les manuscrits et dans plusieurs éditions : cependant il en existe de plus anciens, où il ne se trouve pas. «C'est pour cette raison, ajoute-t-il, que, d'après quelques manuscrits, j'ai retenu quinquaginta centum». Sauf le respect que nous devons à Arntzen, nous pensons que Schott n'a pas moins raison que lui. C'est pourquoi nous avons conservé la leçon des éditions que nous avions sous les yeux, quoiqu'il soit très probable qu'à cette époque le territoire de la république ne pouvait suffire à un tel partage.

(5)  On appelle émancipés les enfants qui ne sont plus soumis à la puissance paternelle, en vertu des lois. L'émancipation avait lieu à Rome par une vente simulée qu'un père faisait à son fils. Ainsi Licinius était réellement possesseur de mille arpents, que cinq cents en son propre nom.

(6)  Il fut condamné, selon Paul Orose, à payer 10000 as d'airain.