Chapitre 57

Comment de nouveaux députés de Messine et de Palerme vinrent trouver le roi En Pierre à Alcoyll, avec encore plus de pleurs et de douleur que les premiers ; et comment l'armée, tout d'une voix, cria merci au roi En Pierre, pour qu'il voulût bien secourir les Siciliens.

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A quatre jours de là, il arriva deux autres barques armées, venant de Sicile, avec semblable message que les premières, mais d'une manière bien plus triste encore. Dans l'une d'elles étaient deux chevaliers et deux citoyens de Messine qui était assiégée par le roi Charles, ainsi que vous l'avez vu, et ils étaient tous sur le point d'être pris et tués ; l'autre barque, venant de Palerme, portait également deux chevaliers et deux citoyens qui venaient aussi avec des pouvoirs de toute la Sicile. Ils avaient comme les autres des vêtements noirs, ainsi que des voiles et des pavillons noirs. Pour une lamentation qu'avaient faite les autres, ceux-ci en firent quatre fois autant, de sorte que tous les assistants en eurent une telle pitié, qu'ils s'écrièrent tous à la fois : «Seigneur, en Sicile ! seigneur, en Sicile ! Pour l'amour de Dieu, ne laissez pas périr ce pauvre peuple qui doit appartenir à vos enfants.»

Les riches-hommes, voyant quel était le désir de toute l'armée, allèrent trouver le roi, tout contrits, et lui dirent : «Seigneur, que faites-vous ? Au nom de Dieu, ayez pitié d'un peuple infortuné qui vient vous crier merci ; il n'y a pas de coeur si dur au monde, chrétien ou Sarrazin, qui n'en eût pitié. Nous vous en prions chèrement ; et vous devez encore plus vous y sentir porté par les raisons que ces gens vous ont déjà données, qui sont de toute vérité, et aussi à cause de la dure réponse que vous avez reçue du pape. Croyez que tout ceci vient de Dieu, car si Dieu voulait que votre dessein de rester en ce lieu s'accomplît, il aurait inspiré au pape l'idée de vous seconder ; mais il a voulu que votre demande vous fût refusée, afin que vous allassiez secourir un peuple misérable. Ce qui vous démontre encore que telle est la volonté de Dieu, c'est que la voix du peuple est la voix de Dieu et que voici tout votre peuple de cette armée qui crie qu'on le mène en Sicile. Qu'attendez-vous donc, seigneur ? Nous vous affirmons, en notre nom et au nom de toute l'armée, que nous vous suivrons et périrons pour la gloire de Dieu et pour votre honneur, et pour la restauration du peuple de Sicile ; nous sommes tous prêts à vous suivre sans solde.»»


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