[IV. Les membres de la conjuration]

Chapitre 3 Sommaire Chapitre 5

On conçoit facilement que le sénat préoccupé par les attaques incessantes de César et du parti démocratique, eût oublié pour quelque temps Catilina et ses complots. On pouvait croire que, découragé par ses revers, en proie aux embarras d'une fortune dissipée dans ses procès et ses candidatures malheureuses, il ne cherchait plus qu'à se faire oublier. Mais les derniers événements avaient au contraire ranimé son audace. Si les progrès rapides de César prouvaient la faiblesse du gouvernement, ils démontraient aussi à Catilina la nécessité de précipiter ses tentatives contre une administration chancelante, sous peine de se voir enlever le prix de la victoire par un homme qui avait refusé de s'associer à ses projets. Tandis que César, minant avec une patiente activité la constitution cornélienne, avait tout à espérer du temps qui augmentait le nombre et les forces de ses partisans, Catilina craignait de perdre chaque jour son influence sur des hommes turbulents et téméraires, qu'il avait bien pu réunir pour un coup de main, mais qui l'abandonneraient bientôt s'il les laissait dans l'inaction. L'un était à la tête d'une armée immortelle, car les peuples ne périssent point, dont l'ardeur ne devait cesser qu'avec les griefs qui l'avaient soulevée ; l'autre ne voyait autour de lui qu'un petit nombre d'aventuriers, sans drapeau depuis la mort du dictateur, étrangers pour ainsi dire dans leur patrie, car ils en avaient oublié les lois et les moeurs parmi la licence des guerres civiles. C'était une colonie de conquérants qui s'éteignait au milieu des populations vaincues. Chaque jour affaiblissait le souvenir de leurs exploits, tandis que la mémoire de leurs crimes se perpétuait dans une génération nouvelle, pleine de mépris pour leur petit nombre et leur misère.

Lorsque Catilina pour la seconde fois se préparait à briguer le consulat, il s'était entouré de ses anciens compagnons d'armes ; il avait réuni des sénateurs, des chevaliers, des hommes de toute profession, connus pour avoir une clientèle soit à Rome, soit dans les villes de la Péninsule. Dans les assemblées qui eurent lieu chez lui avant l'ouverture des comices, il leur avait exposé ses plans de gouvernement ; il leur avait fait les promesses ordinaires aux candidats. Honneurs, richesses, on pouvait tout espérer de lui. Pour encourager ses partisans il éclatait en bravades contre ses adversaires. A mesure que s'évanouissait pour lui l'espoir d'un triomphe dans les comices, les déclamations devenaient plus violentes, les menaces plus directes et plus furieuses. Bientôt ces réunions prirent un autre caractère ; déjà l'on ne parlait plus de gagner ou d'acheter les suffrages, on disait tout haut que le temps était venu d'obtenir le pouvoir par la force, comme avaient fait Marius et Sylla, et qu'il fallait en user comme eux. Proscrire les plus riches sénateurs, confisquer leurs biens, se partager le trésor public et les revenus des provinces, tels furent les projets dont on s'entretint dans la maison de Catilina (1). Mais alors, sans doute, avaient disparu les hommes timides et les alliés politiques qui, à l'exemple de César ou de Crassus, avaient pu favoriser en secret sa brigue, sans se compromettre jusqu'à prendre des engagements irrévocables. Il ne lui restait plus que quelques sénateurs perdus de dettes et désespérés comme leur chef, des officiers de Sylla qui pouvaient craindre un sort pareil à celui de Luscius et de Belliénus ; enfin, cette foule de jeunes débauchés, habitués à se laisser conduire par lui, qu'il enflammait en leur peignant les émotions nouvelles d'une guerre civile, et la licence plénière qui allait commencer pour eux. Ou dit que dès avant le résultat des comices où furent nommés Cicéron et Antonius, une nouvelle conjuration s'était déjà formée, et s'il en faut croire quelques historiens, les hôtes de Catilina se seraient engagés les uns aux autres par un serment terrible, en buvant tous, dans la même coupe, du vin mêlé avec le sang d'un esclave égorgé (2). Ce fait, sur lequel un auteur grave et contemporain élève des doutes (3), paraîtra peut-être répugner à la vraisemblance, si l'on n'y voit de la part des conjurés qu'un moyen de s'assurer les uns des autres par une horrible communauté de crime. Mais d'un autre côté, si l'on se reporte aux idées superstitieuses des anciens, à leur crédulité dans la magie, qui se lie si intimement aux religions du paganisme, on peut voir dans cet affreux mélange de sang et de vin un de ces rites secrets dont le pouvoir n'était alors nié par personne. Cette communion par le sang formait une espèce de dévouement mystérieux qui devait frapper avec force l'imagination des jeunes complices de Catilina et les lier d'une manière indissoluble à leur chef ; car, au moment de s'engager dans une entreprise hasardeuse, le sacrifice d'une victime humaine était, selon les croyances antiques, le moyen le plus sûr de se rendre les dieux favorables, ou plutôt de contraindre leurs volontés (4).

Quelles furent les résolutions d'une assemblée tenue sous de pareils auspices ? Quelles têtes furent proscrites, quels forfaits ou quelles extravagances furent médités, c'est ce qu'il est impossible de savoir jamais. On devine que parmi les conjurés il y eut, pour ainsi dire, plusieurs degrés d'initiation. Il importait à Catilina de ne pas rompre ses relations avec un grand nombre de personnages puissants qu'il eût effrayés en leur dévoilant tous ses projets. Aux uns il dut parler d'intrigues électorales, aux autres d'une émeute à Rome, d'un soulèvement en Italie ; à ses fidèles, seulement, il put promettre des proscriptions ou des massacres. Pendant longtemps son but ostensible fut la poursuite d'un consulat. Après sa défaite, en 690, il annonça l'intention de se représenter aux prochains comices, et de fait il continua de briguer les suffrages l'année suivante (5). Mais en même temps il rassemblait secrètement des armes, enrôlait des soldats, envoyait des émissaires dans des villes italiotes et même dans des provinces éloignées. Le mauvais succès de sa première conjuration lui avait sans doute démontré la nécessité de n'éclater à Rome que lorsqu'il aurait réuni au dehors des forces considérables, et l'on a lieu de croire que des insurrections combinées à la fois sur plusieurs points de la Péninsule devaient donner le signal d'un soulèvement dans la ville.

Il semble que les conjurés étaient divisés entre eux quant aux moyens d'action. Quelques-uns, persuadés que dans les circonstances où ils se trouvaient, nul secours n'était à dédaigner, opinaient pour armer les esclaves, faciles à séduire depuis la guerre de Spartacus, par quiconque leur offrait l'espoir de la liberté. Déjà régnait une grande fermentation en Apulie (6), et dans toute la Péninsule les esclaves étaient si nombreux en comparaison de la population libre, que les amener sur le champ de bataille c'était en quelque sorte s'assurer la victoire. Mais d'autres chefs parmi les conjurés, et surtout Catilina (7), s'opposaient fortement à une alliance si dangereuse. Sans doute préoccupé de retenir dans ses intérêts quelques membres des classes opulentes, il eût craint de se les aliéner en menaçant pour ainsi dire tous les grands propriétaires. En effet, l'affranchissement des esclaves eût ruiné tous les riches de l'Italie. La dernière révolte avait prouvé d'ailleurs que les esclaves pouvaient trouver des chefs dans leurs rangs, et il ne se souciait probablement pas d'avoir à partager les fruits de sa victoire avec quelque nouveau Spartacus.

Après Catilina, le personnage qui paraît avoir tenu le rang le plus considérable parmi les conjurés, était P. Cornélius Lentulus Sura (8), consulaire depuis l'année 683. Rayé de l'Album des sénateurs pour le scandale de ses désordres, il avait brigué la préture, et l'avait obtenue en même temps que Cicéron était nommé consul (9). S'il obéissait comme ses complices à l'ascendant que Catilina exerçait sur tous, au moment du danger, Lentulus se flattait secrètement que sa haute naissance et l'illustration de sa famille lui assureraient le premier rang après la victoire. Il croyait de bonne foi que la révolution qui se préparait ne se ferait que pour lui. Une vaine superstition ajoutait encore à la confiance du fier patricien toujours entouré des images de douze consuls ses aïeux. Après l'incendie du Capitole qui détruisit les livres sibyllins (10), ce fut à qui prétendrait en avoir recueilli des fragments, et ces lambeaux de prophéties devinrent une autorité irréfragable pour cette multitude d'haruspices qui exploitaient dans la ville la crédulité publique, tin de ces oracles communiqué à Lentulus annonçait que trois Cornélius seraient rois à Rome (11). Déjà Cornélius Cinna et Cornélius Sylla avaient commencé à justifier la prédiction. Il est vrai que jamais nom ne fut plus commun, ni famille plus nombreuse ; mais Lentulus ne pouvait soupçonner que l'oracle regardât un autre que lui, et sur cette assurance il se jeta les yeux fermés dans la conjuration.

Les sénateurs et les chevaliers affiliés au complot comme lui, avaient joué la plupart un rôle subalterne dans les dernières guerres civiles, presque tous dans le camp de Sylla, quelques-uns dans celui de Marius. Mais déjà ils avaient oublié leurs passions politiques. Aujourd'hui la pauvreté, suite inévitable de leur vie dissolue, les avait réunis par un sentiment commun d'envie et de haine contre les riches. Arracher le pouvoir aux hommes qui dominaient dans le sénat, pour se partager les honneurs et les tributs des provinces, tel était leur espoir, leur but avoué, prêts d'ailleurs pour y parvenir à commettre tous les crimes que leur commanderait celui qu'ils reconnaissaient pour chef.

Le grand nombre d'Italiotes enrôlés par Catilina paraît indiquer l'étendue de ses plans. Ce n'était plus une émeute comme la première fois, mais une guerre civile qu'il voulait exciter. On peut remarquer encore que la plupart de ses émissaires dans la Péninsule travaillaient les provinces où la guerre sociale avait laissé le plus de souvenirs. Dans l'Ombrie c'était Septimius ; dans l'Etrurie, Mallius, vieil officier du dictateur, Furius de Fesulae, et Flaminius Flamma d'Arretium ; dans le Bruttium, T. Volturcius de Crotone (12). Là, en effet, les soldats colonisés par Sylla se trouvaient en assez grand nombre, et pour la plupart réduits à l'indigence par leur paresse et leur inconduite. Pour eux une guerre et une guerre civile était le seul moyen de vivre et de faire fortune, et l'on espérait que le nom et la réputation de Catilina suffiraient pour leur faire reprendre les armes. A côté de ces vétérans usurpateurs, beaucoup de paysans dépouillés par eux, poussés au brigandage par le désespoir, paraissaient disposés à offrir leurs services à tout chef audacieux qui leur montrerait l'appât d'un riche butin (13). Une misère commune ralliait oppresseurs et opprimés dans le Samnium et dans l'Etrurie, de même qu'à Rome les sénateurs qui avaient dissipé leur patrimoine oubliaient auprès de Catilina les anciens drapeaux qu'ils avaient suivis dans les dernières guerres civiles.

Dans la Gaule cisalpine et même au delà des Alpes, les conjurés avaient des agents actifs. P. Sittius, en Afrique, correspondait avec eux, et son adresse merveilleuse, rare chez un Romain, à capter l'affection des Barbares, son audace, ses intelligences en Espagne, où il exerçait une grande influence, le rendaient propre à remplacer Pison, et à faire au besoin une diversion puissante (14).

Parmi les associés de Catilina il ne faut point oublier quelques femmes nobles, auxiliaires sur lesquels il fondait de grandes espérances. Les unes pouvaient entraîner leurs maris, les autres surprendre leurs secrets, quelques-unes servir ses vengeances. Jadis une conjuration de dames romaines avait décimé le sénat par le poison, et Catilina n'avait pas oublié qu'une femme de sa famille, une Sergia, avait présidé cette mystérieuse association (15). Il savait que chez les femmes de son temps il pourrait trouver la même dépravation et la même audace.

Vers la fin de l'année 691, au moment de subir pour la troisième fois l'épreuve des comices consulaires, Catilina croyait toucher au but de ses menées. Une vingtaine de sénateurs ou de chevaliers, beaucoup de jeunes praticiens, des tribuns et des centurions anciens serviteurs de Sylla, quantité de citoyens notables dans les villes italiennes, étaient affiliés à la conjuration et n'attendaient qu'un signal de lui pour agir. Il avait réuni sur plusieurs points de l'Italie des vétérans colonisés, et des magasins d'armes avaient été formés par ses soins, pour les équiper lorsque leurs services deviendraient nécessaires. A l'embouchure du Tibre, une division de la flotte autrefois employée contre les pirates, avait été depuis longtemps travaillée par ses émissaires, et il se flattait de l'enlever facilement (16). Dès lors il était maître d'affamer Rome, qui tirait ses subsistances de l'Egypte ou de la Sicile, ou bien, en cas de revers, il eût trouvé un refuge assuré à bord de ses vaisseaux. Dans la ville, ses prétentions au consulat étaient appuyées avec plus ou moins de franchise par les chefs des factions hostiles au gouvernement, et même par Antonins, l'un des consuls (17). Soit par l'intrigue, soit par la violence, Catilina ne doutait point de l'emporter dans les comices qui allaient s'ouvrir. La constitution de la société antique, et surtout la situation de l'Italie à cette époque, avait permis à Catilina de pousser fort loin des préparatifs, qu'aujourd'hui un gouvernement régulier arrêterait au premier indice. Mais alors pour disposer de masses puissantes, un chef de parti n'avait pas besoin de confier ses projets à la populace et de se mettre pour ainsi dire à sa merci. Il lui suffisait de gagner un petit nombre de personnages influents pour compter sur la foule obéissante attachée à leurs maisons. A Rome et dans l'Italie, tel chevalier avait une famille, c'est-à-dire une troupe de clients, d'affranchis et d'esclaves, qu'on aurait pu nommer ailleurs une petite armée. Quelques-uns entretenaient des gladiateurs par centaines, d'autres avaient sur leurs terres des bergers dont en un jour on faisait des soldats. Il faut considérer encore qu'il n'y avait presque point de troupes dans la Péninsule, à peine quelques faibles garnisons pour la police des villes ou la garde des arsenaux. Enfin, l'administration municipale était pour ainsi dire sans force. En effet, une conséquence inévitable de l'émancipation des Italiotes avait été d'attirer dans la capitale toutes les familles riches et puissantes, empressées de jouer un rôle sur le grand théâtre qui venait de leur être ouvert. Dans les villes secondaires, les magistratures étaient souvent conférées, il est vrai, à des membres de ces familles, et les Romains les plus illustres ne dédaignaient pas ces faciles honneurs (18), parce qu'au jour des comices ils leur donnaient le droit d'appeler, pour voter dans la capitale, ceux qu'ils consentaient à nommer leurs concitoyens. Mais les hommes qui prétendaient à gouverner la république ne daignaient pas administrer eux-mêmes des municipes. Ils y présidaient des jeux, ou faisaient inscrire leurs noms sur des monuments élevés à leurs frais ; c'était encore une manière de s'assurer des suffrages. L'administration véritable des villes italiennes demeurait cependant à des hommes obscurs qui conservaient un respect traditionnel pour les citoyens de la capitale, et surtout pour quiconque tenait à ces grandes maisons admises presque seules dans le sénat de la république (19).

Cette dernière considération peut expliquer, ce me semble, la facilité que trouvait Catilina pour ourdir ses trames. Cependant les indiscrétions de quelques-uns des conjurés, et ces rumeurs confuses qui toujours précèdent une grande catastrophe, enfin des phénomènes naturels interprétés par la superstition populaire comme des présages funestes, jetaient dans les esprits une vague terreur, augmentée encore par l'ignorance du danger véritable qui menaçait la république. On se rappelait que deux ans auparavant la foudre était tombée plusieurs fois sur le Capitole, qu'elle avait renversé des statues de dieux et de grands hommes. Des tables de bronze sur lesquelles d'anciennes lois étaient gravées avaient été fondues enfin, la flamme céleste avait mutilé la statue de Romulus enfant allaité par la louve, un des plus anciens monuments de la ville (20). Les devins rassemblés de toutes les parties de l'Etrurie interprétaient ces phénomènes en annonçant des massacres, des incendies, la destruction des lois, la guerre civile (21). Pour conjurer tant de malheurs, ils avaient, il est vrai, indiqué plusieurs sacrifices, plusieurs cérémonies extraordinaires ; mais la crédulité publique s'alarmait plus des menaces divines qu'elle ne se fiait aux préservatifs employés pour les détourner.


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(1)  Tum Catilina polliceri tabulas novas, proscriptionem locupletium, magistratus, sacerdotia, rapinas, alia omnia quae bellum atque lubido victorum fert (Sall., Cat., 21).

(2)  Dio Cass., XXXVII, 30. - Flor., IV, I, 4. - Sall., Cat., 22. Dion Cassius rapporte que Catilina égorgea un jeune esclave, et qu'après avoir prononcé une formule de serment, il la confirma en prenant entre ses mains les entrailles de l'esclave, ce que firent successivement tous ses complices après lui. C'était le rite ordinaire, sauf le choix de la victime. Stürtz, dans sa traduction latine de Dion Cassius, fait manger les entrailles aux conjurés : je ne sais où il a pu prendre occasion de cet étrange contre-sens.

(3)  Nonnulli ficta haec et multa praeterea ab iis existumabant, qui Ciceronis invidiam leniri credebant, atrocitate sceleris eorum qui poenas dederant. Nobis ea res, pro magnitudine, parum comperta est (Sall., Cat., 22). - Cicéron n'accuse pas formellement Catilina de cet odieux sacrilège ; cependant on pourrait y voir une allusion mystérieuse dans le passage suivant de la première Catilinaire : «Quae quidem (sica) quibus abs te initiata sacris as devota sit, nescio, quod eam necesse putas consulis in corpore defigere». (Cat., I, 6.)

(4)  L'histoire romaine fait mention de plusieurs sacrifices humains célébrés solennellement par ordre des magistrats de la république. - Interim ex fatalibus libris sacrificia aliquot extraordinaria facta : inter quo Gallus et Galla, Graecus et Graeca, in foro boario sub terra vivi demissi sunt in locum saxo consaeptum, jam ante hostiis humanis, minime Romano sacre imbutum (Liv., XXII, 57, U.C. 538). - Plutarque (Marcell., 3), rapporte presque dans les mêmes termes un sacrifice semblable qui eut lieu, onze ans auparavant, sous le consuls de M. Valérius Messala et de L. Apustius Fullo. - Si l'on en croit Porphyre et quelques apologistes chrétiens, on aurait sacrifié annuellement des victimes humaines à Jupiter Latiaris jusque dans le troisième siècle de notre ère (Porphyr., de Abst.). - Et Latio in hodiernum Jovi media in urbe humanus sanguis ingustatur (Tertull., Adv. Gnost., 7 ). - Hodieque ab ipsis Latiaris Jupiter homicidio colitur (Min. Fel., 315). - Latiaris Jupiter etiam nunc sanguine colitur humano (Lactant., De fals. rel., I, 21). - N'en déplaise à Plutarque, qui vante la douceur des rites de ses compatriotes, des sacrifices semblables et cette horrible communion par le sang se retrouvent chez les Grecs (Hérodot., III, 11). On sacrifia longtemps dans Athènes des hommes à Bacchus Homadius, c'est-à-dire anthropophage (Porphyr., de Abst., II, 55). - L'oracle de Delphes ordonna aux Messéniens de sacrifier une vierge dans leur guerre contre Lacédémone (Paus., IV, 9.) On pourrait multiplier les citations à l'infini. Je n'en ajouterai qu'une seule, tirée de Xiphilin. Des bergers égyptiens ayant attiré dans une embuscade un centurion romain et son ordonnance, massacrèrent le premier, et sacrifièrent le second, puis mangèrent ses entrailles (Dio Cass., Excerpt. per Xiph.., lib. LXXI, 4). - Tant d'exemples prouvent combien était générale, chez les anciens, la croyance dans le pouvoir mystérieux des sacrifices humains, et l'usage de se lier les uns aux autres par des serments et un festin d'anthrophages, au moment de se lancer dans une entreprise désespérée.

(5)  Sall., Cat., 26.

(6)  Sall., Cat., 27, 30.

(7)  Cfr. Sall., Cat., 44. - Cic., Cat., III, 4. - On pourrait opposer le passage suivant de Salluste : «Per eas (mulieres) se Catilina, credebat posse servitia urbana sollicitare, urbem incendere, vires earum vel adjungere sibi vel interficere». (Cat., 24.) Mais il ne s'agit ici, comme il semble, que d'un coup de main dans Rome. La lettre de Lentulus (voy. § 7) prouve évidemment le dissentiment qui régnait entre lui et Catilina au sujet de l'émancipation des esclaves.

(8)  Le sobriquet de Sura, gras de jambe, lui fut donné à l'occasion d'une plaisanterie grossière qui lui échappa dans un procès capital où il se trouvait impliqué. Malgré le danger de sa situation, il était trop persuadé qu'un Lentulus ne pouvait être condamné, pour quitter devant le tribunal le ton de bouffonnerie qui lui était ordinaire. Faisant allusion à une espèce de punition usitée parmi les enfants dans leurs jeux, il dit à ses juges en étendant la jambe : «Me trouvez-vous coupable ? Frappez ! je suis prêt». Ce mot peint et la légèreté de l'homme et son aveugle confiance (voy. Plut., Civ., 17).

(9)  Probablement pour rentrer ainsi dans le sénat. Ce fait montre comment, après avoir été dépouillé du titre de sénateur par les censeurs, on pouvait être réintégré par les suffrages du peuple en obtenant une magistrature inférieure à la précédente.

(10)   En 671. Cic., Cat., III, 4. - App., Civ., I, 83. - Jul.Obs., 118.

(11)  Plut., Cic., 11. - Cic., Cat., III, 4. (2)

(12)  Sall., Cat., 27. - Un mouvement en Campanie était également projeté (Cic., Pro Sest. 4).

(13)  Sall., Cat., 28.

(14)  Sall., Cat, 21. - Sittius parait avoir été un aventurier de la trempe de Sertorius. Il rendit les plus grands services à César, pendant la guerre d'Afrique, en dirigeant contre le roi Juba une armée de Maures et de Gétules (Caes., Bell. Afric., 25, 30, 95, 90.

(15)  Liv., VIII, 18. A. de R. 423.

(16)  Cic., Post. red. ad Quir., 7.

(17)  Cic., in Pis. - Pro Sext., 3. - Schol. Bob., pro. Set., 93, suiv.

(18)  Voir la lettre de Cicéron à Brutus ad Div., 13, 11. - Sigon., De antiq. jure Italiae, 2, 7.

(19)  Une anecdote que j'ai rapportée dans une note précédente peut donner une idée de la faiblesse des magistrats romains à l'égard des hommes qui appartenaient à des familles illustres. On a vu que César, âgé de vingt-cinq ans, levait des soldats pour prendre des pirates, sans demander l'autorisation du préteur qui commandait dans la province. Malgré les ordres positifs de ce magistrat, il faisait mettre à mort un grand nombre de ces pirates. Le préteur dévorait l'affront : c'est qu'il sentait qu'il avait affaire à un Julius, bien apparenté, riche, et destiné à devenir un jour son supérieur.

(20)  On montre à Rome, dans le musée du Capitole, une louve en bronze de style étrusque, que l'on prétend être celle dont il est ici question. Le bronze détruit en quelques parties, et des traces de fusion, semblent confirmer cette attribution, que plusieurs savants ont admise.

(21)  Cic., Cat., III, 8. - Jul. Obs., 122.