Acte II

Acte I Acte III

Scène 1
Octave, Mécène

OCTAVE
Oui, Mécène, je sais qu'une ardente vengeance
A souvent confondu le crime et l'innocence,
Qu'à des yeux prévenus le mal paraît un bien,
Que la haine est injuste et n'examine rien ;
Mais je sais encor mieux qu'une aveugle clémence
Loin d'arrêter le crime, en nourrit la licence :
Plus on doit épargner les hommes vertueux,
Plus il faut des méchants faire un exemple affreux.
Quel que soit mon courroux, il est si légitime
Qu'il ne me permet pas le choix d'une victime :
Le seul infortuné digne de mes regrets,
Dont la mort flétrirait à jamais nos décrets,
C'est l'orateur fameux pour qui Rome m'implore,
Et qu'un funeste amour me rend plus cher encore.
Le divin Cicéron, dont le nom glorieux
Triomphera toujours dans ces augustes lieux ;
Je veux le rendre aux pleurs de l'aimable Tullie,
Et le sauver des coups de l'indigne Fulvie.
Tu l'as vu cette nuit, conçois-tu quelque espoir
Qu'il veuille en ma faveur employer son pouvoir ?
Il est bon qu'en public il prenne ma défense,
Pour disposer le peuple à plus d'obéissance,
Et que par ses amis il inspire au sénat
De réunir en moi tout le triumvirat.
César, pour rétablir l'état en décadence,
Crut devoir s'emparer de la toute-puissance ;
Il sentit (et j'ai dû le sentir comme lui)
Qu'il ne faut aux Romains qu'un seul maître aujourd'hui.

MECENE
Cicéron désormais n'a qu'un désir unique,
C'est de vous voir, seigneur, sauver la république,
D'Antoine qu'il méprise abaisser la grandeur,
Devenir du sénat l'âme et le protecteur :
Sur tout autre projet il sera peu flexible.
Cependant à vos soins il m'a paru sensible :
Essayez d'engager ce fier républicain
A vous laisser jouir du pouvoir souverain ;
C'est sur ce point qu'il faut le vaincre ou le séduire.
Cicéron, dès qu'il peut vous servir ou vous nuire,
Ne vous laisse qu'un choix, le perdre ou le sauver :
Le plus digne de vous est de le conserver ;
Son amitié, son nom, ses conseils, sa prudence,
Son crédit au sénat, surtout son éloquence,
Deviendraient votre appui dans un péril pressant.

OCTAVE
Rien n'est si dangereux dans un état naissant
Que ces hommes de bien que le public admire,
Qui, sur le préjugé d'un vertueux délire,
N'embrassent le parti des autels ou des lois
Que pour tyranniser les peuples ou les rois.

Scène 2
Octave, Mécène, Cicéron

OCTAVE
J'aperçois Cicéron ; laisse-nous seuls, Mécène.

Scène 3
Octave, Cicéron

OCTAVE, à part
Que sa douleur me trouble, et me cause de peine !
(haut)
A votre nom célèbre on doit trop de respect
Pour croire que le mien vous puisse être suspect.
Quoique des triumvirs il ait lieu de se plaindre,
Cicéron près de moi sait qu'il n'a rien à craindre.
Comme il s'agit de Rome, à ce nom si chéri
Je suis sûr de trouver votre coeur attendri,
Et que vous me verrez ici sans répugnance.

CICERON
Comment avez-vous pu désirer ma présence ?
César, en quel état vous offrez-vous à moi ?
Ah ! ce n'est ni son fils, ni César que je voi ;
Vos mains n'en ont que trop souillé la ressemblance,
Et Rome n'en peut trop pleurer la différence.
Malheureux ! pouvez-vous, sans l'inonder de pleurs,
Sur son sein déchiré déployer vos fureurs ?
O César, ce n'est pas ton sang qui l'a fait naître !
Brutus qui l'a versé méritait mieux d'en être :
Le meurtre des vaincus ne souillait point tes pas ;
Ta valeur subjuguait, mais ne proscrivait pas :
Si tu versais du sang pour soutenir ta gloire,
De ta clémence en pleurs tu parais la victoire ;
Et vous, sans redouter l'exemple de sa mort,
Vous semblez n'envier que son funeste sort :
Peu jaloux d'hériter de ses sages maximes,
Cruel, vous ne songez qu'à parer des victimes.

OCTAVE
D'un reproche odieux qui blesse mon honneur,
Cicéron, modérez l'indiscrète rigueur :
Mais, pour justifier un discours qui m'étonne,
Et que mon amitié cependant vous pardonne,
César, que vous venez de placer dans les cieux,
Et que pour m'abaisser vous égalez aux dieux,
En quels lieux, répondez, a-t-il perdu la vie ?
Fut-ce aux bords de la Seine, ou dans Alexandrie ?
Est-ce aux champs de Pharsale, où pour votre bonheur
La victoire à genoux couronnait sa valeur ?
Non, ce fut au sénat, et dans le sein de Rome
Que l'on osa trancher les jours de ce grand homme ;
Et vous m'osez blâmer de répandre le sang
De ceux dont la fureur lui déchira le flanc !
Quel autre ai-je proscrit ? orateur téméraire !
Je voudrais en pouvoir couvrir toute la terre :
Quelque sang qu'à sa mort j'ose sacrifier,
Je n'en connais aucun digne de l'expier.
Du meurtre de César condamner la vengeance,
C'est des plus noirs forfaits consacrer la licence.

CICERON
Un meurtre, quel qu'en soit le prétexte ou l'objet,
Pour les coeurs vertueux fut toujours un forfait ;
Mais les républicains ne se font pas un crime
D'immoler un tyran même digne d'estime :
Ils ne regardent point leur tyran comme un roi
Qu'élevé au-dessus d'eux la naissance ou la loi ;
Et, sans avoir pour lui les lois ni la naissance,
César osa des rois s'arroger la puissance.
Non que des conjurés j'approuve la fureur ;
Je déteste leur crime, encor plus son vengeur ;
Car vous multipliez à tel point les supplices,
A Brutus vous cherchez tant de nouveaux complices,
Qu'il semble que César renaisse chaque jour,
Et que chacun de nous l'assassine à son tour.
Contre un peuple à genoux armer la tyrannie,
De l'univers entier détruire l'harmonie,
Et de ses ennemis se défaire à son choix,
Rendre le glaive seul l'interprète des lois,
Employer pour venger le meurtre de son père
Des flammes ou du fer l'odieux ministère,
Donner à ses proscrits pour juges ses soldats ;
Du neveu de César voilà les magistrats.
Qui vous a confié l'autorité suprême ?

OCTAVE
Le besoin de l'état, mon épée, et moi-même.
Et de quel droit enfin osez-vous aujourd'hui
Interroger César, et César votre appui ?
Revenez d'une erreur qui vous serait fatale :
Un homme tel que moi ne veut rien qui l'égale ;
Dès que César n'est plus, et qu'il revit en moi,
Qui d'entre les Romains doit me donner la loi ?
Croyez-vous rétablir par votre politique
D'un peuple et d'un sénat l'union chimérique ?
Ce n'était qu'un vain nom dès le temps de Sylla,
Qui s'est évanoui depuis Catilina.
Si de nos Scipions les jours pouvaient renaître,
Ce n'est que sous moi seul qu'on les verrait paraître :
Mais vous voyez assez qu'il n'est aucun espoir
De remettre les lois dans leur premier pouvoir.
Le glaive qui vous fit gagner tant de victoires,
Et qui de nos exploits embellit tant d'histoires,
Le glaive qui vous fit triompher tant de fois,
Vous subjugue à son tour, et triomphe des lois.
Dès qu'il faut obéir, le parti le plus sage
Est de savoir se faire un heureux esclavage.
La liberté n'est plus qu'un bien d'opinion ;
Le nom de république une autre illusion,
Dont il faut rejeter l'orgueilleuse chimère,
Source de trop de maux pour vous être encor chère.
Qu'espérez-vous enfin quand tout est renversé,
Quand le sénat n'est plus qu'un troupeau dispersé ?
Où sont vos légions pour soutenir la gloire
De ce corps dont sans vous on perdrait la mémoire ?
En vain vous prétendez affranchir les Romains
Du joug qu'ils imposaient au reste des humains :
L'univers nous demande une forme nouvelle,
Et Rome un empereur qui commande avec elle :
Trop heureux les Romains si pour ce haut emploi
Ils n'avaient désormais à redouter que moi !
Mon collègue insolent vous fait assez connaître
Que d'un emploi si noble il se rendrait le maître,
Si vous pouviez souffrir qu'il osât s'en saisir ;
Mais vous me choisirez, si vous savez choisir.
Le cruel triumvir demande votre tête ;
Son crédit l'obtiendra, si le mien ne l'arrête.
Un intérêt si cher doit nous concilier.
Pour mieux détruire Antoine il faut nous allier.
Vos vertus, vos malheurs, mon amour pour Tullie,
Mon honneur, tout m'engage à vous sauver la vie.
Vous fûtes autrefois mon premier protecteur,
Votre bouche longtemps s'ouvrit en ma faveur ;
Je vous dois mes grandeurs, une amitié sincère.
Aimez-moi, Cicéron, et devenez mon père.

CICERON
Abdique, je t'adopte, et ma fille est à toi,
Pourvu qu'elle consente à te donner sa foi,
Qu'elle daigne accepter l'époux de Scribonie,
Et qu'au sort d'un César elle veuille être unie :
Je doute cependant qu'élevée en mon sein,
Un tyran, quel qu'il soit, puisse obtenir sa main.
Elle vient, tu pourras t'expliquer avec elle :
Si tu l'aimes, tu dois la prendre pour modèle.
Rentre dans ton devoir, sois Romain ; à ce prix
Tu deviendras bientôt son époux et mon fils :
Mais si tu veux toujours tenir Rome asservie,
Tu peux quand tu voudras me livrer à Fulvie.

Scène 4
Octave

OCTAVE
L'excès où Cicéron vient de s'abandonner
M'éclaire, et d'un complot me le fait soupçonner :
C'est lui qui doit trembler, et c'est lui qui menace !
Sans Brutus ou Sextus, il aurait moins d'audace.

Scène 5
Tullie, Octave

TULLIE
Tandis que pour lui seul je venais en ces lieux,
Cicéron tout à coup disparaît à mes yeux ;
Je n'en ai pas moins vu qu'une peine mortelle
Accablait son grand coeur d'une douleur nouvelle.
Se peut-il qu'un objet si digne de pitié
Ne puisse triompher de votre inimitié ?
Languissant, malheureux, sans amis, sans défense,
Aurait-il de César essuyé quelque offense ?
J'ai vu que tout en pleurs il s'éloignait de vous,
Et vos yeux sont encore enflammés de courroux.

OCTAVE
Si les vôtres daignaient lire au fond de mon âme,
Ils seraient peu troublés du courroux qui l'enflamme,
Et vous jugeriez mieux des sentiments d'un coeur
Digne de s'enflammer d'une plus noble ardeur.
Quelque haine que fasse éclater votre père,
Pour oser le haïr sa fille m'est trop chère ;
Je n'oublîrai jamais qu'en vous donnant le jour
C'est à lui que je dois l'objet de mon amour.
Ah ! loin de l'outrager, c'est Cicéron lui-même
Qui venge ses chagrins sur un coeur qui vous aime.
Plus il est malheureux, plus je m'attache à lui,
Surtout depuis qu'il n'a que moi seul pour appui.
C'est pour lui conserver et les biens et la vie
Que j'arme contre moi la cruelle Fulvie :
Lorsque César enfin s'offre pour votre époux,
Cicéron est encor plus injuste que vous.

TULLIE
Je vous croyais toujours l'époux de Scribonie ;
Mais avec vos pareils malheur à qui s'allie !
A vous voir d'un hymen nous imposer la loi,
On croirait que César peut disposer de moi,
Et qu'au mépris des lois, au défaut du divorce,
Il peut quand il voudra m'obtenir par la force,
Et qu'enfin, au-dessus d'un citoyen romain,
Il veut de ses amours traiter en souverain.
Encor si vous aviez abdiqué la puissance,
Ou plutôt d'un tyran abdiqué l'arrogance,
Vous pourriez à vos voeux permettre quelque espoir.

OCTAVE
Si j'osais abdiquer le souverain pouvoir,
Quel rang pourrais-je offrir désormais à Tullie ?

TULLIE
Le rang d'un citoyen père de la patrie ;
D'un Romain qui ne sait briguer d'autres honneurs
Que ceux dont la vertu couronne les grands coeurs.

OCTAVE
Prévenu comme vous des chimères romaines,
Si de l'autorité j'abandonnois les rênes
Pour régler ma fortune au gré de mon amour,
Antoine voudra-t-il abdiquer à son tour ?

TULLIE
Eh ! que peut m'importer que le cruel abdique,
Dès que nous n'avons plus ni lois ni république ?
Impérieux amant, qui me parlez en roi,
Savez-vous que Brutus est moins Romain que moi ?
Régnez, si vous l'osez ; mais croyez que Tullie
Saura bien se soustraire à votre tyrannie :
Si du sort des tyrans vous bravez les hasards,
Il naîtra des Brutus autant que des Césars.

OCTAVE
De la part de Tullie un dédaigneux silence
Eût été plus séant que tant de violence :
Je ne m'attendais pas qu'un si cruel mépris
De tout ce que j'ai fait dût être un jour le prix.
De l'ingrat Cicéron j'ai souffert les caprices
Sans me plaindre de lui ni de ses injustices :
Notre père au sénat m'a cent fois outragé ;
Dans ses emportements il n'a rien ménagé ;
Avec mes ennemis son coeur d'intelligence
N'a jamais respiré que haine et que vengeance ;
Tandis qu'avec ardeur je combattais les siens,
Cicéron à me perdre encourageait les miens ;
Je viens d'en essuyer la plus sanglante injure,
Sans qu'elle ait excité le plus léger murmure :
Et l'on m'outrage, moi! je suis un inhumain
Dont sans crime à son gré l'on peut percer le sein !
Pourquoi? parce qu'on veut arracher aux supplices
Du meurtre de César l'auteur et les complices,
Et que le furieux qui lui perça le flanc
S'abreuve dans le mien du reste de son sang.
César, qui jusqu'au ciel vit s'élever sa gloire,
Immortel ornement du temple de mémoire ;
César, indignement traîné dans le sénat,
N'est point encor vengé d'un si noir attentat ;
Et si je veux vous plaire il faut que je l'oublie.
Que je laisse un champ libre au père de Tullie,
Qui veut que de César les lâches meurtriers
Rentrent dans le sénat couronnés de lauriers ;
Et que, sacrifiant à Brutus son idole,
J'aille de son poignard orner le capitole !

TULLIE
Auriez-vous prétendu qu'à vos ordres soumis,
Cicéron à vos coups dût livrer ses amis ;
Que, de vos cruautés spectateur immobile,
Son coeur désespéré vous laisserait tranquille ?

OCTAVE
D'autres soins le devraient occuper aujourd'hui :
Antoine, avec fureur soulevé contre lui,
Me demande à grands cris le sang de votre père.
Notre hymen peut sauver une tête si chère ;
Quoique d'un triumvir tout soit à redouter,
A peine sur ce point on daigne m'écouter :
Le péril cependant redouble, et le temps presse ;
Au sort de Cicéron Rome qui s'intéresse,
Sans doute avec plaisir verrait notre union
Le terme spécieux de la proscription.
Devenez de la paix le lien et le gage ;
C'est l'unique moyen de dissiper l'orage.
Je vois ce qui vous flatte en ce cruel instant,
C'est le frivole honneur d'un refus éclatant :
Mais ne présumez pas que je me détermine
A me priver du rang que le ciel me destine ;
Si je m'en dépouillais, ce serait me livrer
Au premier assassin qui voudrait s'illustrer.

TULLIE
Après ce fier aveu, je crois, pour vous confondre,
N'avoir à votre amour que deux mots à répondre :
Je ne vous aime point ; j'aimerais mieux la mort
Que de me voir un jour unie à votre sort :
Cependant si César veut déposer l'empire,
A son fatal hymen je suis prête à souscrire ;
Dût mon coeur indigné n'y consentir jamais,
Je me sacrifîrai pour le bien de la paix :
Mais si vous usurpez l'autorité suprême,
Vous pouvez de mon sang teindre le diadème :
Que ne peut ma mort seule en relever le prix,
Et sauver de vos coups tant d'illustres proscrits !

OCTAVE
Ah ! c'en est trop ; songez, orgueilleuse Tullie,
Que c'est vous qui livrez votre père à Fulvie.

Scène 6
Tullie

TULLIE
Barbare, que mon coeur ne peut trop dédaigner,
Nous saurons mieux mourir que tu ne sais régner.
Dieux cruels, épuisez sur moi votre colère,
Ou de son désespoir daignez sauver mon père !
O Romains ! que l'honneur de mériter ce nom
Coûte cher, si l'on veut imiter Cicéron !
Tout est perdu pour moi.

Scène 7
Clodomir, Tullie

CLODOMIR
                     Je vous cherchais, madame.
Quel trouble à mon aspect s'empare de votre âme !
Quoi! vous levez au ciel vos yeux baignés de pleurs !
N'ai-je donc pas assez éprouvé de malheurs ?
Les premiers n'ont que trop exercé ma constance :
Ah, Tullie ! autrefois ma plus chère espérance,
Pardonnez à mon coeur quelques transports jaloux ;
L'heureux César va-t-il devenir votre époux ?

TULLIE
Eh ! plût au ciel n'avoir d'autre malheur à craindre !
Vous et moi nous serions peut-être moins à plaindre ;
Offrez à ma douleur de plus dignes objets.
Accablé de ses maux, consumé de regrets,
Mon père avant sa mort veut que notre hyménée
Eclaire de ses feux cette horrible journée.
Eh ! que lui servira d'unir des malheureux
Menacés comme lui du sort le plus affreux ?
Quel temps a-t-on choisi pour me faire connaître
Un époux qui n'aura qu'un seul moment à l'être ?
Sextus, mon cher Sextus, renoncez à ma main ;
Ce n'est pas moi qui dois borner votre destin.
Lorsque j'ai désiré que vous fussiez Pompée,
Hélas ! qu'en ce souhait mon âme s'est trompée !
A peine mon amour voit combler ce désir
Que je perds à la fois Sextus et Clodomir.
Pourquoi de votre nom m'a-t-on fait un mystère ?

SEXTUS
J'ai cru devoir moi-même y forcer votre père ;
Je craignais de jeter dans un coeur généreux
Trop d'effroi, s'il avait à trembler pour nous deux :
D'ailleurs convenait-il au fils, du grand Pompée
De se montrer ici sans éclat, sans armée,
Lui qui ne prétendait s'offrir à vos regards
Qu'en protecteur de Rome, et vainqueur les Césars ?
Eh ! que ne veut-on pas quand l'amour est extrême ?
Clodomir désirait d'être aimé pour lui-même :
Sextus sans votre amour pouvait-il être heureux ?
Mais en d'autres climats venez combler mes voeux.
Vous pleurez : depuis quand votre coeur intrépide
N'oppose-t-il au sort qu'un désespoir timide ?
Je viens de rassembler quelques soldats épars,
Dispersés sous leurs chefs autour de ces remparts ;
Vous les trouverez tous ardents à vous défendre :
Et si de la valeur le succès doit dépendre,
J'espère que la mienne y pourra concourir,
Ne dût-il m'en rester que l'honneur de mourir.
Dès que pour vous dans Rome il n'est plus d'espérance,
Allons de la Sicile implorer l'assistance.
Ma flotte nous attend, je règne sur les eaux :
Engageons votre père à fuir sur mes vaisseaux ;
Il est honteux pour lui de se laisser proscrire :
Vous avez sur son coeur un souverain empire,
Venez ; faisons-lui voir qu'un glorieux retour
Peut le mettre en état de proscrire à son tour.
S'il veut m'accompagner, je réponds de sa vie,
Et l'amour couronné répondra de Tullie.


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